• Le fantôme de Radio Liberty

    Le fantôme de Radio Liberty

    Sous la belle plage de Pals, en Catalogne, le pacifique troupeau bronzeur des touristes modernes ne soupçonne même pas la présence de l’immense fantôme d’une étonnante réalisation qui est restée plantée là pendant une cinquantaine d’années : les antennes de Radio Liberty.

     

     

     

    Le fantôme de Radio Liberty

    La Plage de Pals aujourd’hui.

     Le fantôme de Radio Liberty

    Encadré : zone de l’ancienne Radio Liberty

    Nous sommes en 1955, à la fois en pleine période dure du franquisme, et pendant la « Guerre Froide » (1947 – 1989) entre les USA et l’URSS.

    La Guerre des ondes.

    A cette époque là, pas d’Internet et pas de « réseaux sociaux » sur lesquels on fait aujourd’hui la propagande politique, guerrière ou terroriste.

    La seule manière de franchir le « Rideau de Fer » était la radio, en ondes courtes qui portent loin. Mais, même avec la radio, ce n’était pas chose facile ! La première tentative fut faite à partir de l’Allemagne, et l’expérience dura exactement 20 minutes, au bout desquelles l’URSS avait déjà mis en place un efficace système de brouillage...

    L’ « American Comitte for Liberation » (AMCOMLIB) se livra alors à une étude exhaustive de tous les points de l’Europe d’où l’on pourrait émettre des ondes difficiles à brouiller.

    Il nous faut ici regarder de plus près ce qu’est la transmission des ondes radio.

    Selon leur longueur propre, les ondes radio n’ont pas le même comportement en ce qui concerne leur propagation ; par exemple, la « modulation de fréquence » circule un peu comme la lumière : en ligne droite, et elle craint les obstacles. Mais, à l’époque, elle n’était pas à l’ordre du jour.

    Les ondes utilisées par Radio Liberty étaient de type « modulation d’amplitude », et dans la catégorie « ondes courtes », dont la longueur est comprise entre 10 et 100m.

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    En bleu : ondes de Radio Liberty

    En rouge : ondes de l’URSS

    La particularité principale de ces ondes est qu’elles « rebondissent » sur les hautes couches de l’atmosphère, puis sur le sol (et encore beaucoup mieux sur l’eau), comme une balle prisonnière dans un cerceau, même le jour, et qu’elle sont capables de faire le tour de la Terre et de revenir à l’envoyeur en une fraction de seconde.

    Il convenait donc de calculer le « rebond » de telle manière qu’il tombe sur Moscou, et cela dépendait de multiples variables, dont la présence ou l’absence d’obstacles et de surfaces de réflexion.

    Bref, la Catalogne fut considérée comme la base de lancement idéale, et, en Catalogne, une plage semi déserte à l’époque, celle de Pals, à la hauteur de Gerona, car la Méditerranée offrait un magnifique plan de réflexion et d’amplification.

    Les Américains, avec la CIA, n’eurent pas vraiment de difficultés pour convaincre Franco de l’interêt d’émettre de la propagande anti communiste !

    En 1958, ils achetèrent à Pals une bande littorale d’environ 34 ha, au nom de l’Etat espagnol, qui en devenait donc le propriétaire, et la leur relouait selon un bail qui devait aller jusqu’en 2015.

    Cette émetteur ferait partie du vaste réseau de Radio Liberty qu’ils possédaient dans le monde, et ils avaient vu grand, car il allait devenir le plus puissant de tous.

     

    De gigantesques travaux furent entrepris, à commencer par une route, puis par la construction des bâtiments et l’érection de 12, 14 puis 18 tours pour les antennes.

     Le fantôme de Radio Liberty

    Plan d’ensemble des installations

    La technologie employée était le nec plus ultra mondial, à tous points de vue.

    Le choix se porta sur l’ antenne « rideau » qui est très « directive », et que l’on peut donc régler avec une grande précision sur sa cible.

    Le fantôme de Radio Liberty

     

    Il y avait cinq antennes constituées chacune d’un ensemble de tours et de « rideaux », avec trois modèles de pylones, les plus grands mesurant presque 170 m de haut !

    Afin de bien arroser le territoire de l’URSS, la puissance requise était gigantesque. Il fallait des générateurs à la mesure : cinq énormes moteurs diesel attelés à des générateurs de 3 MW (mégawats) tournaient nuit et jour à la base !

     Le fantôme de Radio Liberty

    Le fantôme de Radio Liberty

    Vue d’ensemble, à la grande époque

    Et, bien sûr, un personnel très spécialisé dans tous les domaines commença à affluer vers cette enceinte protégée, entre autres, des speakers natifs : en effet, Radio Liberty arriva à émettre en 17 langues !

    La première émission, prévue le 23 mars 1959 à 3h, eut lieu seulement à 3h 05, car la nervosité était à son comble et, au moment de lancer la première bobine sur le magnétophone, le technicien appuya sur « rewind » au lieu de « play »...

     

    Petit à petit, tous les personnels se mirent à former une grande famille, et ils étaient particulièrement choyés ! Bureaux luxueux, bibliothèque, salles de réunion, commémoration conviviale de toutes les Fêtes, rencontres entre gens particulièrement courtois et compétents, etc.

    Et les Américains payaient bien !

    Un ancien garde civil raconte comment, dans son premier métier, il gagnait 800 pesetas par mois, et qu’employé comme garde des lieux, il en toucha aussitôt 5.000 !

    Tous ceux qui s’en souviennent aujourd’hui parlent de « la meilleure période de leur vie ».

     

    Les « Palsencs » —c’est leur nom en catalan— allaient de surprise en surprise, et les « légendes urbaines » couraient bon train dans la petite ville qui comptait alors moins de 2.000 habitants. Les antennes provoquaient-elles des maladies mortelles, y avait-il des missiles et des bombes atomiques sous la base, la CIA espionnait-elle tout le monde et envoyait-elle des messages codés, Gorbatchef écoutait-il Radio Liberty pour se tenir au courant de ce qui se passait dans son propre pays ?

     

    En 1989, après la chute du Mur de Berlin et de l’URSS, la question se posa sérieusement du futur de Radio Liberty. Dorénavant, elle n’avait plus le même sens ni la même utilité, et le « feu sacré » s’était éteint. Elle devint définitivement muette le 25 mai 2001.

     

    Mais les installations étaient toujours debout, et en 2002 commença à poindre un phénomène bien tristement connu aujourd’hui : le Djihad islamique. Les Américains eurent un nouveau projet qui aurait peut-être été utile :

    Le fantôme de Radio Liberty

    On ne le saura jamais, car les Indépendantistes, les Ecologistes et ... les promoteurs s’y opposèrent, et le 22 mars 2006...

     

     

    Le fantôme de Radio Liberty

    La chute des antennes

     

     Le fantôme de Radio Liberty

    « ¡Qué putada ! » murmure discrètement le père, devant sa fillette de sept ans qui s’exclamait « Papá, ¿qué pena, no ? ».

     

    Le projet de Musée n’a jamais vu le jour.

    Par contre, un immense golf occupe maintenant la moitié de l’ancien site auquel il donne désormais son nom.

    Il reste encore une zone protégée où s’épanouissent des plantes et des animaux uniques dans cette zone.

    Mais, rassurez-vous, les promoteurs sont à l’affût et, la corruption endémique fera le reste, sur ce sujet sensible !

    Daniel D.

     

     


  • Commentaires

    1
    Jeudi 1er Juin 2023 à 16:42

    encuentro a faltar que digan el origen de algunas de las fotografías i documento, ya que solo pueden haber salido de mi página web, pero se lo han hecho suyo de forma descarada.

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