• Condor - Caryl Ferey

     

    Condor - Caryl Ferey

    Condor

    Caryl Férey

    2016

    Présentation de l'éditeur :

    "Condor, c'est l'histoire d'une enquête menée à tombeau ouvert dans les vastes étendues chiliennes. Une investigation qui commence dans les bas-fonds de Santiago submergés par la pauvreté et la drogue pour s'achever dans le désert minéral de (Atacama, avec comme arrière-plan l'exploitation illégale de sites protégés... Condor, c'est une plongée dans l'histoire du Chili. De la dictature répressive des années 1970 au retour d'une démocratie plombée par l'héritage politique et économique de Pinochet. Les démons chiliens ne semblent pas près de quitter la scène... Condor, c'est surtout une histoire d'amour entre Gabriela, jeune vidéaste mapuche habitée par la mystique de son peuple, et Esteban, avocat spécialisé dans les causes perdues, qui porte comme une croix d'être le fils d'une grande famille à la fortune controversée..."

      L'auteur :

    Caryl Férey vit à Paris. Après s'être aventuré en Nouvelle-Zélande avec sa " saga maorie " (Haka et Utu), en Afrique du Sud avec Zulu (récompensé entre autres par le Grand Prix de littérature policière en 2008 et adapté au cinéma en 2013) puis en Argentine avec Mapuche, il nous entraîne avec Condor dans une exploration sombre du Chili, dans une course-poursuite sanglante transfigurée par l'amour. Le nouveau roman de Caryl Férey nous fait voyager et frémir autant que réfléchir et nous rappelle, s'il le fallait, que l'auteur s'est imposé comme le maître du thriller des grands espaces et de l'ailleurs.

    Extrait :

    "Dès deux mille mètres, l'aridité est extrême dans le désert d'Atacama : dans la Vallée de la Lune, il ne tombe pas une goutte d'eau. Plaques fracturées, reliefs de plissements tectoniques d'une beauté muette, sauf les oiseaux au repos, chaque animal de passage ou égaré y est voué à une mort certaine. Ici les pierres parlent. Leur mémoire est lente, de l'infini minéral lissé par un vent multimillénaire – fossiles, brutes, chromatiques, sauvages ou neutres, elles racontent l'inénarrable du temps qui est et ne passe pas, ce pouls secret dont les chamanes atacamènes perpétuaient l'odyssée. Les pierres parlent, ou chantent quand, dévalant les sommets, le souffle gelé des Andes les polit en mordant l'éternité. Usures dynamiques, telluriques, primitives, c'est le vent qui dicte et façonne en architecte capricieux l'inclinaison du temps. Tout est immobile dans le grand désert du Nord, immanent. Les conquérants incas les avaient assujettis les premiers, mais on trouve encore les traces des premiers Atacamènes dans les peintures murales des grottes : dessins d'animaux, de mains plaquées selon la texture du pigment, autant de tentatives de survie pétrifiée dans la roche. Les pierres parlent et crient parfois : c'est dans ce désert que la dictature avait installé ses camps de concentration. Des centaines d'opposants politiques étaient emprisonnés dans des baraquements sommaires, souvent sans identification, plus sûrement assassinés et jetés dans les poubelles de l'Histoire. Des disparus, hommes et femmes que les militaires enterraient au petit bonheur d'un océan rocailleux, une balle dans la nuque en guise de linceul. Leurs squelettes s'étaient mêlés aux os des quatre mille Atacamènes tués par les Incas. Fraternité des barbelés. Mais le propre d'un disparu est de différer le deuil pour ses proches, jusqu'à l'hypothétique découverte du cadavre aimé… L'absence d'eau ralentissant la décomposition des os, on peut encore croiser de vieilles femmes errant à la recherche de leurs fils ou maris assassinés, grattant le sol pour en découvrir les tombes, retournant les pierres, quêtant les signes, de pauvres folles qui tous les jours arpentent un territoire de deux cent mille kilomètres carrés. Elizardo Muñez les croisait parfois, au hasard des hauts plateaux où il habitait depuis son retour, des femmes-saules penchées sur le destin de leurs disparus, ratissant la croûte terrestre comme si les os allaient en sortir. " Caryl Férey "Condor"

    Avis de l'Atelier-lecture de la Tertulia : 

     De cet auteur j’ai déjà lu « Zulu », livre que j’ai puissant, impressionnant et bouleversant, puis j’ai poursuivi avec « Mapuche » qui m’a plongée dans l’enfer de la dictature argentine. Le jour de la parution de « Condor », c’est sans aucune hésitation que j’ai acheté ce roman. L’histoire débute ainsi :
    Ă la Victoria, quartier d’une extrême pauvreté de Santiago du Chili envahi de drogues dures, le fils du directeur d’une radio locale est retrouvé mort. C’est le quatrième jeune à être retrouvé ainsi. Comme la police se moque de ces morts, commence alors une enquête menée par une équipe composée de Gabriela, jeune vidéaste d’origine mapuche et Esteban, fils à papa en rupture avec son milieu et avocat des causes perdues. Une magnifique histoire d’amour naîtra entre la jeune mapuche, héritière des traditions de ses origines et l’avocat chic et désespéré. D’autres personnages gravitent autour d’eux : Stefano, l’ancien soutien d’Allende qui s’est exilé puis est revenu au pays, le père Patricio, curé de cette paroisse déshéritée : deux personnages qui éclairent le livre chacun à leur manière. Après c’est la noirceur : des anciens de la DINA, police secrète de Pinochet : ceux-ci sont toujours aux manettes et même aux meilleures places : trafic de drogue, direction des ports, des usines grâce à la privatisation accélérée, exploitation des mines, mise en coupe réglée du sol et du sous-sol même dans les zones les plus protégées : on assiste là aux conséquences d’un néo-libéralisme débridé qui s’est abattu sur le pays dans les années 19710…
    Caryl Férey est un éternel voyageur qui parcourt les pays qu’il met en scène, tisse des liens intimes avec leurs populations, s’imprègne de leur passé et de leur histoire. Si quatre années séparent « Condor » de « Mapuche », c’est le temps qu’il a fallu à l’auteur pour approcher les gens, enquêter à la manière d’un journaliste, se fondre dans le Chili. De tout cela est né un roman passionnant qui plonge dans les ravages d’un terrible passé, qui explore les plaies encore ouvertes d’une nation dans laquelle ce passé est toujours présent. J’ai profondément aimé ce roman qui offre, en prime, un très beau passage poétique. Je pense qu’il peut être dédié à Victor Jara et Pablo Neruda. Lorsque je l’ai refermé, je n’ai eu qu’une envie : m’envoler vers le Chili….
    Voici ce qu’écrit Caryl Ferey à propos de son roman ( extraits) :
    « Ce roman « chilien » est à la fois cousin de « Mapuche » pour sa proximité historique et géographique, le couple amoureux qui s’y déploie envers et contre tous… et les thèmes qui me sont chers : fascisme ordinaire, néolibéralisme exacerbé, conditions des peuples autochtones, planète mise à mal par l’incurie de gouvernements clientélistes. « Condor » est aussi bien différent de mes autres livres « étrangers » : la violence y est moins brute (l’insécurité au Chili est sociale), le chaos plus psychologique…Il y a surtout un roman dans le roman, pierre angulaire du livre, explorant d’autres territoires du polar… »  Martine 

    Livre dur et passionnant. L’intrigue se déroule au Chili à l’époque actuelle. Le récit débute par la découverte du cadavre d’un jeune garçon, le 4ème en quelques jours, sur un tas d’ordures près des habitations des populations pauvres de Santiago. Une jeune Mapuche va se lancer à la recherche d’un avocat afin d’alerter les politiques et faire cesser ce carnage. Cet avocat « des causes perdues » comme il se présente lui-même, issu d’une riche famille qu’il méprise suite à la façon dont elle a acquis cette fortune, accepte d’enquêter. Trafics de drogue, corruption, appât de l’argent, violences extrêmes, Pinochet a de nombreux héritiers qui lui survivent actuellement au Chili. Josette

    "J'ai apprécié ce polar socio-politique mais un peu moins que le précédent (Mapuche). Il m'a semblé un peu caricatural avec des clichés qui laissent transparaître la nationalité française de son auteur. Par exemple, la consommation exclusive de "Pisco sour" et de "ceviche" des héros laisse supposer que la gastronomie locale se réduit à ces deux spécialités qui, si elles sont excellentes, sont loin d'être les seules. Cela sent un peu le guide touristique.

    Ce roman, s'il ne montre pas assez l'importance de la classe moyenne, a cependant le mérite de mettre un bémol à l'apparente réussite économico-démocratique du pays en montrant que les sociétés ultra-libérales de bon nombre de pays latino-américains sont surtout assujetties aux oligarchies locales confortées par le pouvoir de la finance internationale." Françoise H

    "Roman très fort et intéressant. C’est l’état du Chili actuel qui vit les conséquences du régime de Pinochet. Bien sûr, il y a une trame policière mais à travers elle on voit une misère effrayante dans les quartiers pauvres ainsi que les ravages de la drogue et la cruauté du monde des dealers." Marie-Jo

     

    La critique de l'Obs : http://bibliobs.nouvelobs.com/polar/20160401.OBS7693/condor-chili-con-ferey.html

    Entretien avec Caryl Férey : http://www.gallimard.fr/Media/Gallimard/Entretien-ecrit/Entretien-Caryl-Ferey.-Condor

     

     

     


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