• Atelier lecture du 31/05/2018

     

    « La villa des prodiges » Eduardo Mendoza

    L’avis de Françoise L.  :

    L’auteur est né en 1943 à Barcelone. Il écrit en castillan et en catalan. Il a obtenu le prix Cervantès (la plus grande récompense littéraire du monde hispanique) en 2016 pour l’ensemble de son œuvre. Son roman publié en 1986 a été adapté au cinéma en 1999 sous le même titre.

    Onofre Bouvila entre dans Barcelone où se prépare l’exposition universelle de 1888. Ce petit paysan très pauvre va accomplir un miracle entre cette exposition et la suivante de 1929 et va devenir un riche industriel dans une ville ravagée par la pauvreté. C’est un anti-héros sans scrupule qui sort tout droit des romans picaresques du XVIème siècle. Il est parachuté dans une Barcelone grouillante, entouré de personnages louches, répugnants et malhonnêtes. La décadence et l’évolution de Barcelone vers la fin du XIXème siècle y sont bien dépeintes. La ville elle-même devient le personnage principal du livre en se transformant progressivement en ville moderne. Barcelone est bien « la ville des prodiges » !

     

    « La conquête des îles de la Terre Ferme » Alexis Jenni

    L’avis de Martine :

    Ce roman retrace la conquête du Mexique par Hernan Cortès. Comment en 1521 avec « 500 types de hasard, soudards dépareillés, rassemblés à Cuba » ce conquistador conquiert le grand et brillant empire aztèque au sein duquel régnait Montezuma. Le narrateur, jeune noble espagnol totalement désargenté, est contraint après une histoire d’amour plutôt dangereuse de s’embarquer à Séville pour le Nouveau-Monde. Arrivé à Cuba, il va devenir le secrétaire de Cortès et participera à toutes les batailles de la conquête et pour finir s’installera dans ce pays, sur son domaine exploité par des esclaves indiens qui meurent les uns après les autres.

    Ce livre est une fresque remplie de bruit, de fureur, de violence, de sang, d’horreur, d’exactions, de massacres, servie par une écriture magnifique, profonde, puissante, débordante. Les descriptions, d’une grande précision, soumettent notre imaginaire à rude épreuve. Tout y est à foison : les sacrifices humains, le cannibalisme, les chairs consumées, les démembrements, la puanteur… Ce livre c’est celui :

     De la cupidité, de la soif de l’or qui transforment cette conquête en génocide.

     De la terreur devenue une arme de guerre.

     D’une confrontation de deux mondes incrédules face à ce qu’ils découvrent l’un de l’autre : d’un côté l’incrédulité des Espagnols devant la puissance aztèque, son polythéisme anthropophage, ses sacrifices humains, l’abondance de leur or ; de l’autre côté celle des Indiens tétanisés face aux chevaux, aux armes à feu, aux arbalètes et n’ayant aucune conscience de la valeur de leur or.

     D’une inhumanité qui gagne tous les Espagnols : « ll est étrange ce réflexe que nous avons de ne pas faire souffrir, comme si nous sentions en nous-mêmes la douleur que l'on inflige. C'est peut-être la présence de notre âme immortelle qui nous suggère la douceur, et l'amour pour tout ce qui a deux bras, deux jambes et un visage. Et il est tout aussi étrange que ce sentiment si commun cède si aisément, dès que les circonstances l'éprouvent un peu, dès que les visages autour de nous ne sont plus ceux que nous avons l'habitude de reconnaître, et alors se révèle en nous une capacité d'infliger une douleur infinie, à n'importe qui, avec la plus grande indifférence. »

    Deux figures féminines traversent ce roman. Tout d’abord celle que l’on appellera « La Malinche » qui vivra un temps avec Cortès et sera sa traductrice et celle de la douce Elvira, esclave attribuée au narrateur qui deviendra son épouse et lui donnera un enfant, fondant ainsi le métissage et la descendance.

    Ce livre m’a beaucoup appris et m’a emportée plus loin dans un souci de documentation et de vérité historique. Je l’ai refermé avec un profond sentiment de tristesse et sa puissance a fait qu’il est resté dans mes pensées bien des jours après l’avoir terminé.

     

    « Dans l’épaisseur de la chair » Jean Marie Blas de Roblès

    L’avis de Martine :

    Si l’auteur a dit « mon but est de faire de la littérature, pas de raconter l’histoire de ma famille… », à mon avis les deux sont totalement imbriquées et donc indissociables. Pour moi, ce qui prime dans ce roman c’est le magnifique hommage d’un fils à son père à travers le récit familial qui part de l’immigration d’une humble famille espagnole en Algérie, menant là-bas une vie difficile de colporteur puis de commerçant et qui arrive au retour dramatique et difficile de l’auteur et sa famille en 1962 en France. J’ai beaucoup apprécié cette figure paternelle décrite car elle est profondément humaine et digne. C’est l’histoire d’un homme de bien, plongé dans l’Histoire de l’Algérie qui le dépasse : « Mon père a assisté aux massacres de Sétif, il n'a rien fait, rien dit, rien ressenti, et je ne parviens ni à l'excuser ni à l'en blâmer. Il n'est pas si facile de percevoir ce que l'on voit ; il faut beaucoup d'efforts, de concentration sur l'instant présent, sur ce qu'il offre à notre regard, pour ne pas limiter ses yeux à leur simple fonction de chambre noire." Peut-on avoir le recul nécessaire, quand est on est dans sa propre vie avec tout ce que cela implique, pour analyser un fait et prévoir ses conséquences ? Je passe sur le récit riche en rebondissements, anecdotes, humour, humanité…sa découverte n’en sera que plus appréciée… En second lieu ce qui m’a plu dans ce superbe récit d’une saga familiale c’est qu’il n’est ni le défenseur d’une idéalisation du type « apport de civilisation dans un territoire conquis » ni une dénonciation féroce de ce que certains ont appelé « un crime contre l’humanité ». La réflexion est nuancée, subtile, pas manichéenne et novatrice quand par exemple l’auteur fait le comptage des nombres de viols à la fin de la 2ème guerre mondiale. D’ailleurs l’auteur se livre à une réflexion implacable sur la guerre, il analyse les bienfaits et les injustices de la colonisation et dénonce clairement l’égoïsme des Français de métropole au moment de faire une place à ceux que l’on appellera « les Pieds- Noirs ». Ce fait-là, moi aussi je l’ai ressenti très clairement à l’âge de 13 ans : « les Pieds-Noirs » étaient vécus comme des riches exploiteurs qui rentraient pour « manger le pain des Français de métropole ». Tout tient en une phrase : « Les Pieds-Noirs sont les boucs émissaires du forfait colonialiste ». En 3ème point, j’en arrive à l’aspect littéraire du récit, particulièrement réussi. C’est un roman d’aventures traversé par des figures attachantes comme celle d’Ali le brancardier, ou celle du docteur Hassani qui proposera au père de l’auteur un poste important dans l’Algérie indépendante. Beaucoup de personnages fourmillent dans ce roman, représentatifs de cette société complexe. C’est un plaisir d’écriture et donc de lecture. L’auteur sait plonger le lecteur dans des descriptions d’ambiances particulières : parties de pêche, délicieux repas préparés par la mère de l’auteur, baignades dans la Méditerranée, émouvant loto de Noël 1972 où les souvenirs affluent…sans oublier un côté humoristique très agréable.

    En conclusion, ce récit, c’est celui que fait un fils qui, tout en barbotant dans l’eau, va entrer réellement « dans l’épaisseur de la chair » de son père de 93 ans et va le comprendre. Est-ce la métaphore d’une réconciliation entre la France et l’Algérie ? Ce livre m’a aussi beaucoup rappelé celui, magnifique, de Yasmina Khadra : « Ce que le jour doit à la nuit ». où le héros, lui, est un pharmacien algérien qui , comme le père de l’auteur, soignera les partisans du FLN et les Français d’Algérie. Pour moi ces deux livres se rejoignent par leur humanité, leur souci de nuancer, de montrer la complexité. Et, en conclusion, je lirai prochainement le livre d’Alice Zeniter : « L’art de perdre » dans lequel elle raconte le destin de générations successives de sa famille entre la France et l’Algérie.

     


    votre commentaire
  • Atelier de lecture du jeudi 5 avril 2018

     

    « Dans l’épaisseur de la chair » Jean-Marie Blas de Roblès

    L’avis de Jeanine :

    L’auteur : Né en 1954 à Sidi-Bel-Abbès, puis balloté en Camargue, à Rouen et dans les Vosges après le rapatriement des Français d’Algérie, Jean-Marie Blas de Roblès passe son adolescence dans le Var. Etudes de philosophie à la Sorbonne, d’histoire au Collège de France, régates au long cours en Méditerranée. En poste au Brésil comme enseignant et directeur de la Maison de la Culture Française à l’université de Fortaleza, il reçoit le prix de l’Académie Française pour son recueil « La Mémoire de riz » en 1982. Transfert en Chine Populaire : il aura le privilège de donner les premiers cours sur Sartre et Roland Barthes à l’université de Tien-Tsin (Tianjin), à la fin de la Révolution Culturelle. En 1987, parution de son premier roman « L’impudeur des choses ». Après un séjour au Tibet, il rejoint sa nouvelle affectation à l’université de Palerme en empruntant le Transsibérien. Un deuxième roman « Le Rituel des Dunes » paraît en 1989. C’est à Taïwan (Alliance Française de Taipei) qu’il commence son troisième roman « Là où les tigres sont chez eux » (prix Médicis en 2008) et abandonne l’enseignement pour se dédier à l’écriture. Voyages au Pérou au Yémen et en Indonésie. A partir de 1990, publication d’essais ou de textes poétiques en revues (notamment dans le Mâche-Laurier en 2006 et de « Méduse en son miroir » en 2008 chez Mare Nostrum). Membre de la Mission Archéologique Française en Lybie depuis 1986, il a participé chaque été aux fouilles sous-marines d’ Appolonia de Cyrénaïque, de Leptis Magna et de Sabratha en Tripolitaine. Il dirige actuellement la collection Archéologies qu’il a créée chez Edisud et où il a publié plusieurs ouvrages de vulgarisation. Dans le même cadre d’activités, il est aussi responsable de rédaction de la revue Aouras, consacrée à la recherche archéologique sur l’Aurès antique.

    Le roman : C’est l’histoire de ce qui se passe dans la tête d’un homme ou le roman vrai de Manuel Cortès, rêvé par son fils (avec le perroquet Heidegger en trublion narquois de sa conscience agitée), Manuel Cortès dont la vie pourrait se résumer ainsi : fils d’immigrés espagnols tenant bistrot dans la ville garnison de Sidi-Bel Abbès, en Algérie, devenu chirurgien, engagé volontaire aux côtés des Alliés en 1942 et accessoirement sosie de Tyrone Power, détail qui peut avoir son importance auprès des dames…Et pui, il y a tout ce qui ne se résume pas, tous ces petits faits vrais de la mythologie familiale, les manies du pêcheur solitaire en Méditerranée, les heures douloureuses du départ familial dans l’urgence, et celles, non moins dures, de l’arrivée sur l’autre rive de la mer, de cette famille rapatriée. « Dans l’épaisseur de la chair » est un roman ambitieux, émouvant, admirable qui s’ancre d’abord dans l’amour, l’estime infinie d’un fils pour son père. C’est aussi, à travers l’histoire personnelle d’un homme, tout un pan de l’histoire de l’Algérie, depuis l’arrivée des grands-parents, venus d’Espagne, jusqu’au retour en France, au début des années soixante. Et ça commence par une apostrophe terrible, lancée par le père à son fils- Tu n’as jamais été un vrai pied-noir- doublée d’une question en écho : qu’est-ce qu’un vrai pied-noir ? Le récit est enlevé, brillant, philosophique, drôle, émouvant, bien sûr, sur une période peu exploitée dans le roman contemporain… Et avant tout un magnifique hommage d’un fils à son père.

     

    L’avis de Françoise H :

    Ce livre est un chef-d’œuvre de littérature, c'était la volonté de l'auteur et c'est réussi. Je l'ai découvert après avoir refermé le livre, heureusement car cette démarche me trouble un peu. Il a en effet déclaré « mon but est de faire de la littérature, pas de raconter l’histoire de ma famille »…

    Dès les premières lignes, j'ai été séduite par la qualité d'écriture et la profondeur du récit et de la réflexion.

    Si le premier chapitre déconcerte un peu, les rites des parties de pêche d'un fils et son père, l'histoire se dévoile ensuite : celle de Manuel Cortés le père pied-noir qui défile dans l'esprit de Thomas, le fils, tombé malencontreusement à la mer alors qu'il est parti seul en mer. Ses forces de décembre.

    Il s'agit d'un roman multiple. Tout d'abord l'auteur, historien de formation, nous décrit de façon détaillée et documentée à travers la saga familiale la colonisation de l'Algérie, l'engagement des pieds-noirs au côté des goumiers indigènes dans les débarquements en Italie et en Provence pendant la deuxième guerre mondiale, puis la guerre d'indépendance et enfin le rapatriement en métropole. Quant au philosophe, c'est plutôt sous forme de clin d’œil que l'auteur y fait allusion par la voix du perroquet imaginaire Heidegger qui interpelle Thomas et dialogue avec lui alors qu'il s'accroche au bateau glissant peu à peu vers l'hypothermie.

    extraits du livre :

    «  Il en va des pieds-noirs comme des Byzantins, ils n’ont existé en tant que tels qu’une fois leur monde disparu. » (page 59)

    "Mon père a assisté aux massacres de Sétif, il n'a rien fait, rien dit, rien ressenti, et je ne parviens ni à l'excuser ni à l'en blâmer. Il n'est pas si facile de percevoir ce que l'on voit ; il faut beaucoup d'efforts, de concentration sur l'instant présent, sur ce qu'il offre à notre regard, pour ne pas limiter ses yeux à leur simple fonction de chambre noire. Aveugles : ceux qui se sont contentés de voir, tranche Heidegger. Il a raison, hélas. "

    « La vérité, pourtant, c'est qu'en matière d'exactions sur les populations civiles, goumiers et tirailleurs n'ont pas été plus sauvages que les G I lors de la libération de la France. mille viols pour le corps expéditionnaire français en Italie, à peu près la même chose pour les soldats américains en France et en Angleterre, les russes remportant la palme, avec cent vingt-cinq mille femmes Entre trois et cinq violées dans la seule ville de Berlin.

    Plus qu'une sordide décompensation de soldats épargnés par la mort, le viol a toujours été une véritable arme de guerre. La pire sans doute avec le rapt et la torture... »

    Ces passages ne sont pas représentatifs de l'ensemble du roman mais ces réflexions en réponse aux souvenirs de guerre de Manuel Cortés m'ont interpellée et m'ont confortée dans l'idée qu'on ne peut attribuer à une « race », à une origine ou à une nationalité un non- respect de l'humain en opposition avec notre société que nous croyons civilisée grâce à l'éducation.

    Pour conclure, je dirais que ce roman extrêmement riche sur le plan historique et également plein de réflexion sur la nature humaine est l'un des meilleurs que j'ai lu cette année.

     

    « Tout cela, je te le donnerai /Todo esto te daré » Dolorés Redondo

    L’avis de Françoise H :

    « Tout cela, je te le donnerai /Todo esto te daré » fait référence à un verset de la bible et il s'agit du titre qu'a choisi Dolores Redondo pour son troisième livre. Ce polar ethnique et sociologique a remporté le très mérité prix Planeta 2016 en Espagne . Après la trilogie du Bastan qui avait pour décor le Pays basque, l'auteure nous transporte en Galice où Alvaro Muniz de Dávila, fils d’une famille patricienne décède dans un accident de voiture. Cet accident dans un lieu inattendu est le point de départ d'une enquête menée par le mari du défunt et un policier à la retraite.

    Dolores Redondo aborde des thèmes comme le mariage pour tous, la place de l'église dans la société espagnole et plus particulièrement dans sa noblesse, la pédophilie au sein de l'église, la violence conjugale et nous décrit l'ambiance d'un « pazo » demeure noble de la région ainsi que les paysages somptueux des rives du Miño où les rangs de vigne produisent du vin depuis l'époque romaine.

    Le liant de tous ces ingrédients est assuré avec talent par la vie des personnages et leurs relations complexes dans des mondes qui s'affrontent : celui des traditions à défendre coûte que coûte et celui du modernisme, héritage de la movida.

    « Tout cela, je te le donnerai » est un roman captivant que l'on ne lâche qu'à regret à une heure avancée de la nuit !

     


    votre commentaire
  • Atelier lecture du jeudi 1er mars

    « Lettres de mon enfance » Emma Reyes

    L’avis de Françoise H.  :

    Emma Reyes décrit son enfance à travers des lettres qu’elle envoie à un ami écrivain et diplomate colombien. Les premières années, elle les passe en compagnie de sa sœur légèrement plus âgée et d’un garçonnet surnommé le « pou »  dans un endroit sordide : une pièce aveugle fermée à clé pendant les longues absences de Mademoiselle Maria, l’adulte responsable des enfants, probablement leur mère. Dans les années 20 en Colombie, cette jeune femme, jolie et sans ressources, dépend de protecteurs qui lui procurent du travail comme gérante de chocolateries dans la région de Boyacá,  dans les environs de Bogota. Ces emplois sont pour les petites filles une opportunité d’être  mieux logées. Le garçon, lui, a été abandonné à Bogota.

    Au cours d’un de ces séjours,  Mlle Maria donne naissance à un autre petit garçon laissé aux soins de Emma, pas plus désiré, le contrôle des naissances n’existant pas encore, il ne recevra pas davantage d’affection ni de soins que les fillettes. D’ailleurs ces dernières s’entendent dire que la vie aurait été bien différente sans elles…

    Emma raconte cette existence difficile avec un certain détachement, elle s’y est adaptée par instinct de survie.

    Après le traumatisme de l’abandon, d’abord celui du pou puis celui du bébé et enfin le leur, elles se plient à la vie dure du couvent où elles sont recueillies. A l’âge de 19 ans, sa force de caractère permet à Emma de s’enfuir, de découvrir le monde et de connaître une vie hors du commun. Analphabète, mais habile brodeuse elle tirera profit de ce talent pour investir sa connaissance des couleurs, du graphisme et de l’organisation de l’espace dans la peinture. Elle devient une artiste mondialement reconnue se formant auprès de maîtres renommés successifs et en évoluant dans ses styles au gré de ses expériences et de son parcours de vie.

    Ces lettres écrites trente ans après l'évasion du couvent d'Emma Reyes et de son entrée dans la vraie vie, représentent sans doute le récit des événements les plus marquants, ceux qui se sont gravés dans sa mémoire, peut-être modifiés ou interprétés à travers le prisme du temps et ont contribué à la construction de sa personnalité.

    C'est non seulement un témoignage sur la vie difficile des enfants pauvres du début du XXème siècle en Colombie mais également un tableau de la société colombienne de cette époque, un véritable document historique.

     

    L’avis de Marie-Lou :

    En 1969, Emma Reyes vit à Paris, elle a 50 ans et entame une correspondance avec son ami German Arciniegas. Vingt-trois de ces lettres composent ce livre. Elle y raconte sa vie d’enfant en Colombie, avec sa sœur Héléna qui a deux ans de plus qu’elle. Elles n’ont pas de famille et sont « trimballées » au gré des événements de villes en villages, de maisons en couvents. Elles finissent par rester dans une communauté religieuse où, avec d’autres orphelines et en échanges de travaux forcés, elles survivent bien qu’affamées et maltraitées. Quand elle arrive là, Emma a cinq ans. Son existence est rythmée par les incessantes prières, les travaux domestiques, les punitions. On ne lui parle que du diable et de l’enfer qui la guette si elle n’accepte pas son triste sort. L’ignorance et la crainte des représentants de Dieu sur Terre, que l’on veut à tout prix lui inculquer, ne la briseront pas puisqu’elle décide de voler les clés du portail et s’évade. (Elle est à peine adolescente.) Elle veut «  mettre en marche vers le monde », « sans autre bagage que celui d’une pensionnaire d’orphelinat experte en broderie ». Et, elle va bien la réussir cette nouvelle vie puisqu’elle va voyager à travers le monde (Buenos-Aires, Paris, Washington, Mexico, Périgueux !.. où elle finira sa vie) et deviendra une peintre célèbre. Pour écrire ses souffrances, Emma se remet dans la peau de la petite fille qu’elle était en utilisant un vocabulaire et un langage simple, limite naïf, mais réaliste et émouvant.

    Merci à tout l’atelier lecture

    pour sa disponibilité, sa participation, son enthousiasme

    et bien sûr son talent sans lequel

    la soirée du 29 mars n’aurait pas été celle qu’elle a été !

     


    votre commentaire
  • Atelier de lecture du 18 janvier 2018

    Chère Martine,

    J'ai été très touchée par votre message et je vous en remercie chaleureusement. C'est une joie de voir mon livre aussi bien reçu et compris. Que cette histoire d'un vieux solitaire - écrite dans la solitude de  mon bureau ! - rencontre de tels lecteurs, je ne peux rien souhaiter de mieux.

      Comme vous, je suis totalement imprégnée de l'Espagne, ce pays auquel les Républicains exilés ont dû s'arracher et je vous dis bravo pour votre action culturelle  à travers La Tertulia.

    Bien sûr, si je passe à Villeneuve  sur Lot, ou dans les environs, je ne manquerais pas d'aller vous voir, promis!

    Bien sincèrement à vous

     Y  un saludo a todos los amigos de La Tertulia.


    Carine Fernandez

     Voici donc en introduction le mail que m’a renvoyé Carine Fernandez faisant suite à celui que je lui avais transmis. C’est une très belle réponse qui suscite vraiment l’envie d’une rencontre future. Alors peut-être un jour ?...... Ce compte-rendu commence donc par les avis de son roman :

     

    « Mille ans après la guerre » Carine Fernandez

     L’avis de Marie-Lou :

     Medianoche et Mediodia, deux jumeaux, vivent dans un petit village d’Extremadure quand éclate la guerre civile. En 1938, Mediodia le bon vivant se fait arrêter et fusiller avec toute la jeunesse républicaine du village, il n’a pas 18 ans ! Son frère jumeau, le héros du livre, a la chance de s’en sortir, momentanément, car il était chez le maréchal ferrant pour la mule. Il se cache quelques mois dans la montagne mais dès qu’il redescend au Pueblo il est pris à son tour et fera le tour des camps de travaux forcés du pays jusqu’en 1948 où il sera libéré. Toute sa vie sera habitée par la présence de son frère jumeau, cette moitié de lui-même qui lui manque tant ! Aujourd’hui il vit seul avec son chien et voilà qu’il décide de revenir au pueblo de sa jeunesse, à l’endroit où a commencé son malheur !...Il voyage dans une Extremadure qu’il ne reconnait plus dans ses paysages, à la recherche d’anciens lieux, d’anciens visages (amis ou ennemis, se demande-t-il en les voyant), il nous explique l’histoire côté Rouge, bien entendu :

     

    La position stratégique de l’Extremadure divisée en deux avec la poche de la Serena et de la Siberia qui résistèrent jusqu’au bout.

     

    La haine historique des communistes envers les anarchistes.

     

    La « vérité » que l’on ne connaitra jamais sur la mort du leader anarchiste mythique Buenaventura Durutti.

     

    La terrible désillusion à la libération de la France, une fois le nazisme renversé : après Paris, Berlin, il y avait Madrid !

     

    Negrin, « Le Planqué », chef du gouvernement espagnol en exil, luxueusement installé à Paris.

     

    Le massacre de Badajoz les 14 et 15 juillet 1936 par le général Yagüe «  le boucher de Badajoz », 4000 personnes, hommes, femmes et enfants massacrés en deux jours dans les arènes.

    Et puis dans ce roman, on nous parle aussi des artistes espagnols :

     

    Le philosophe Unamuno à Salamanca défiant la Phalange et à qui le chef de celle-ci dit : « Muerte a la inteligencia ! Viva la muerte ! » le 12 octobre 1936 dans le temple de l’intelligence, l’Université de Salamanca.

     

    Le poète Garcia-Lorca assassiné à Grenade : » On lui a mis deux balles dans le cul à ce pédé ! »

    On n’oublie pas les grands peintres espagnols et dans une scène particulièrement réussie du livre (il s’agit de la visite du musée du Prado) Medianoche, avec sa liberté tout juste retrouvée à Madrid, découvre à sa façon très personnelle, très imprégnée du passé dont il ne parvient pas à se défaire, découvre donc Zurbaran, le Greco, Goya…. On apprend aussi que le directeur du musée du Prado nommé pendant la République était un certain Pablo Picasso. Le livre se termine, Medianoche peut partir. Le passé n’existe plus, avec le village il a été englouti par les eaux du Guadiana. Un nouveau décor est planté : un lac (comme un bleu linceul), de nouveaux personnages, des maisons neuves, un bar…..la vie continue !!!

     

    L’avis de Maria :

     Miguel, un vieil homme, quitte sa maison, fuyant l’arrivée redoutée de sa sœur, pour rejoindre la région où il est né : l’Extremadura, en compagnie de son chien son ami et confident : Ramón. Revenu dans son pays englouti par les eaux d’un barrage, des pans entiers de sa jeunesse surgissent. Dans un style agréable à lire, Carine Fernandez revient sur les années les plus noires qu’ait connu l’Espagne, tout en nous faisant vivre le voyage intérieur de Miguel qui peut enfin se libérer du passé.

     

    L’avis de Françoise H. :

     Medianoche en fuyant l’arrivée de sa sœur qui promet de troubler la torpeur et le confort qu’il s’était ménagé depuis la mort de sa femme, entreprend un retour vers le passé accompagné de son chien Ramón. Cet animal auquel il est très attaché lui permet de supporter son isolement. Il entreprend alors un voyage en Estrémadure, sa région d’origine où il a vécu les années de la guerre et où son frère a été assassiné par les nationalistes après une rafle dans le village. Depuis, il porte en lui la culpabilité du survivant. Son séjour dans le village reconstruit près des ruines du premier englouti sous le lac de barrage créé par Franco, lui permet de réfléchir à son passé, de l’accepter et de regarder enfin le présent. Ce roman parle avec justesse et clarté de l’amitié qui rend supportable toutes les souffrances, de l’amour rendu impossible par la conscience d’appartenir à des classes sociales différentes, de l’Espagne franquiste puis de l’Espagne actuelle où les descendants de ceux qui se sont affrontés cohabitent maintenant et font évoluer ce pays devenu bien différent jusque dans ses paysages.

     

    L’avis de Martine :

     Miguel, alias Medianoche, est un vieux retraité à la gueule tordue, qui vit seul avec son chien dans une cité ouvrière de Madrid où il a passé quarante ans. Une lettre de sa sœur, l’avisant que devenue veuve elle souhaite venir habiter avec lui, le pousse à fuir et à entreprendre un voyage en Estrémadure pour y retrouver son village natal. Mais, là-bas, rien ne ressemble à ce qu’il a connu, son village est enfoui sous les eaux d’un grand lac, et même la végétation n’est plus la même. Il séjourne donc dans un autre village : Castilblanco. Ce voyage réel s’accompagne aussi d’un cheminement intérieur poignant et douloureux, un retour sur son adolescence où il était inséparable de son frère jumeau : Mediodia, arrêté et fusillé à presque dix-huit ans par les nationalistes sous le prétexte d’avoir vandalisé une église. Cette mort dramatique va hanter Medianoche toute sa vie. Même s’il n’était pas présent au moment des faits, il sera arrêté et fera comme il dit : « du tourisme carcéral », notamment dans le terrible camp de Castuera en Estrémadure. Il y connaîtra une magnifique amitié et enfin libéré ira à Madrid où il rencontrera un bel amour qu’il refusera, enfermé dans sa condition sociale. J’ai beaucoup aimé ce livre. Le personnage de Miguel, marqué par la culpabilité du survivant est très émouvant. La guerre d’Espagne avec ses atrocités, ses vies brisées, ses disparus y est largement évoquée, bien qu’après sa fin elle ait provoqué dans le pays une amnésie générale ou citée seulement sous le mot « aquella ». L’écriture est parfois rude mais aussi savoureuse (cf : la visite du musée du Prado), et aussi très évocatrice : on voit, on ressent l’Estrémadure. Ce roman a été un vrai plaisir de lecture.

     

    Carine Fernandez a publié plusieurs romans chez Actes Sud. Longtemps expatriée au Moyen Orient et aux Etats-Unis, elle vit actuellement à Lyon. Pour en savoir plus sur son parcours et son œuvre il faut consulter son site très bien documenté.

     

    « Lettres de mon enfance » Emma Reyes

     L’avis de Janine :

     Emma Reyes est née à Bogota en 1919 et décédée à Bordeaux en 2003. Elle fut une artiste au destin fulgurant. Orpheline, élevée dans un couvent de la capitale colombienne, elle est devenue une peintre de renommée mondiale proche de Frida Kalho et de Diego Rivera qu’elle a fait connaître. En France, où elle a vécu à partir des années soixante, elle a contribué à faire émerger sur la scène artistique une génération entière d’artistes sud-américains. Chevalier des Arts et des Lettres, Emma Reyes laisse derrière elle une œuvre exceptionnelle. Elle était également une conteuse.

    « Lettres de mon enfance » est le récit de vingt-trois lettres inédites adressées à son ami German Arciniegas entre 1969 et 1997 qui racontent son enfance très dure de manière non misérabiliste, mais parfois cocasse, à travers les souvenirs d’une petite fille à l’imagination débordante. Emma et sa sœur Hélène de deux ans son aînée, filles illégitimes, orphelines, ont d’abord été élevées par une prénommée Maria de façon très dure ( corvées d’eau, de pots de chambre…) pour de très petites filles. Au cours d’un déménagement, raconté de manière très drôle, les petites filles étant sur le dos de deux Indiens folkloriques arrivent en retard à la gare et Maria est partie, les abandonnant. Elles sont alors placées dans un couvent pour enfants, elles ont 5 et 7 ans. Les règles y sont très dures, le travail qu’elles fournissent aussi. Emma et Hélène sont inséparables, Hélène protège sa petite sœur. Elles ne voyaient jamais personne de l’extérieur et ignoraient tout du monde. Les sœurs leur inculquaient le péché, l’adoration de Dieu, de la vierge Marie et la crainte du diable. Tout cela faisait partie de leur quotidien avec des punitions très sévères à la clé. Dans cette ambiance rigoureuse se démarque la présence de Carmelita qui n’est pas religieuse, haute en couleurs et à l’histoire vraie. L’arrivée d’une petite nouvelle fascine un groupe de petites filles avec une petite figurine «  Tarrarrurra » qui leur raconte tout ce qui se passe dans le monde et qu’elles croient vivantes. Cette petite nouvelle est renvoyée, traitée de folle et meurt noyée en voulant récupérer sa figurine tombée dans la rivière. Emma est très perturbée par cette annonce et refait pipi au lit, ce qui lui vaut de nombreux châtiments. Ainsi les années s’écoulent et Emma devient la meilleure brodeuse ce qui l’élève à s’occuper de l’aube du pape (qui ne sera pas finie). Par la suite elle travaille auprès de la sacristaine et un jour elle lui vole la clé du portail et s’enfuit, quitte Bogota. Elle ne sait ni lire ni écrire, elle a 19 ans.

    C’est son ami German Arciniegas qui raconte par la suite ses voyages ( Buenos Aires, Montevideo) ainsi que dans la jungle du Paraguay où les guérilleros ont tué son fils. A Buenos Aires, elle gagne le concours international de peinture dont le prix est un voyage à Paris. Sur le livre d’or est inscrit le nom de Picasso. Emma vit à Washington, à Mexico et peint toujours beaucoup. Puis elle s’installe en France à Périgueux avec Jean, son médecin, le grand amour de sa vie, qui deviendra son mari.

    Lettres de mon enfance est un roman inachevé, lu uniquement par Gabriel Garcia Marquez. Il fut publié en 2012 et il est devenu un classique, traduit dans le monde entier.

    L’histoire de cette petite fille cloitrée, maintenue dans la plus grande ignorance du monde, de la culture, mais dotée malgré tout d’un imaginaire extraordinaire, débarquant dans la vie à l’âge de 19 ans m’a passionnée. J’aurais aimé en savoir un peu plus sur la transition et la construction de cette femme, devenue peintre célèbre.

    Emma Reyes commence à peindre en 1943. De ses pérégrinations apparaissent différentes séries.

     

    « Tours et détours de la vilaine fille » Mario Vargas Llosa

     L’avis de Maria :

     C’est l’histoire d’un « amour » qui devient une obsession un peu lassante mais qui parvient à donner envie de finir le livre où se croisent beaucoup d’ambition, de relations destructrices et toujours le retour vers l’homme fidèle et « soumis », obsédé par Lily.

     

    BD « Dolores » Bruno Loth

     L’avis de Maria :

     C’est l’histoire d’un retour sur les origines et la vie de sa mère qui, en maison de retraite semble perdre la tête. Au travers de cette quête, on redécouvre des faits moins connus de la guerre tout en traversant l’Espagne d’aujourd’hui.

    Bruno Loth, auteur de BD français a d’abord travaillé dans la publicité. Ses bandes dessinées, comme «  Ermo » sur la guerre d’Espagne) racontent au travers de personnages souvent fictifs, l’histoire d’un des membres de sa famille lors d’événements qui ont marqué l’Histoire.

     

    BD « Là où se termine la terre » Désirée et Alain Frappier

     L’avis de Maria :

     Au travers de l’enfance et l’adolescence de Pedro, on revit l’histoire du Chili de 1948 à 1970 : la Guerre Froide, la révolution cubaine…et les espoirs qui accompagnent l’élection de Salvador Allende.

    Désirée est journaliste et écrivain. Alain est peintre et illustrateur. Ils travaillent ensemble depuis les années 2000 pour créer des albums. Ce roman graphique est le fruit du témoignage de leur ami Pedro Atias Muños, né à Santiago et exilé en France. Les auteurs ont lancé une participation contributive pour réaliser la suite de ce livre qui nécessiterait de s’immerger plusieurs mois au Chili.

     

    « Une offrande à la tempête » Dolores Redondo

     L’avis de Françoise L. :

     Troisième livre de la trilogie du Batzan. Dans cette vallée, une petite fille décède, étouffée dans son berceau. Une pression a été appliquée sur le visage du bébé. Alors que la police soupçonne le père d’être impliqué, la grand-mère attribue ce meurtre au génie maléfique INGUNA, issu de la mythologie basque. Rapidement cet étrange décès lève le voile sur une série de morts subites et suspectes de nourrissons. L’inspectrice Amalia Salazar décide de se consacrer entièrement à cette nouvelle enquête, au risque de mettre de côté son rôle de mère. Cette enquête la renvoie à sa propre histoire.

    De nouveau on est emporté dans le pays basque espagnol. On est frappé par le rythme énergique de la narration ainsi que par les rebondissements. On s’enfonce dans l’histoire sans frein. On est captivé autant qu’éprouvé et l’on veut connaitre la fin.


    votre commentaire
  • Atelier de lecture du 18 janvier 2018

    Chère Martine,

    J'ai été très touchée par votre message et je vous en remercie chaleureusement. C'est une joie de voir mon livre aussi bien reçu et compris. Que cette histoire d'un vieux solitaire - écrite dans la solitude de  mon bureau ! - rencontre de tels lecteurs, je ne peux rien souhaiter de mieux.

      Comme vous, je suis totalement imprégnée de l'Espagne, ce pays auquel les Républicains exilés ont dû s'arracher et je vous dis bravo pour votre action culturelle  à travers La Tertulia.

    Bien sûr, si je passe à Villeneuve  sur Lot, ou dans les environs, je ne manquerais pas d'aller vous voir, promis!

    Bien sincèrement à vous

     Y  un saludo a todos los amigos de La Tertulia.


    Carine Fernandez

     Voici donc en introduction le mail que m’a renvoyé Carine Fernandez faisant suite à celui que je lui avais transmis. C’est une très belle réponse qui suscite vraiment l’envie d’une rencontre future. Alors peut-être un jour ?...... Ce compte-rendu commence donc par les avis de son roman :

     

    « Mille ans après la guerre » Carine Fernandez

     L’avis de Marie-Lou :

     Medianoche et Mediodia, deux jumeaux, vivent dans un petit village d’Extremadure quand éclate la guerre civile. En 1938, Mediodia le bon vivant se fait arrêter et fusiller avec toute la jeunesse républicaine du village, il n’a pas 18 ans ! Son frère jumeau, le héros du livre, a la chance de s’en sortir, momentanément, car il était chez le maréchal ferrant pour la mule. Il se cache quelques mois dans la montagne mais dès qu’il redescend au Pueblo il est pris à son tour et fera le tour des camps de travaux forcés du pays jusqu’en 1948 où il sera libéré. Toute sa vie sera habitée par la présence de son frère jumeau, cette moitié de lui-même qui lui manque tant ! Aujourd’hui il vit seul avec son chien et voilà qu’il décide de revenir au pueblo de sa jeunesse, à l’endroit où a commencé son malheur !...Il voyage dans une Extremadure qu’il ne reconnait plus dans ses paysages, à la recherche d’anciens lieux, d’anciens visages (amis ou ennemis, se demande-t-il en les voyant), il nous explique l’histoire côté Rouge, bien entendu :

     

    La position stratégique de l’Extremadure divisée en deux avec la poche de la Serena et de la Siberia qui résistèrent jusqu’au bout.

     

    La haine historique des communistes envers les anarchistes.

     

    La « vérité » que l’on ne connaitra jamais sur la mort du leader anarchiste mythique Buenaventura Durutti.

     

    La terrible désillusion à la libération de la France, une fois le nazisme renversé : après Paris, Berlin, il y avait Madrid !

     

    Negrin, « Le Planqué », chef du gouvernement espagnol en exil, luxueusement installé à Paris.

     

    Le massacre de Badajoz les 14 et 15 juillet 1936 par le général Yagüe «  le boucher de Badajoz », 4000 personnes, hommes, femmes et enfants massacrés en deux jours dans les arènes.

    Et puis dans ce roman, on nous parle aussi des artistes espagnols :

     

    Le philosophe Unamuno à Salamanca défiant la Phalange et à qui le chef de celle-ci dit : « Muerte a la inteligencia ! Viva la muerte ! » le 12 octobre 1936 dans le temple de l’intelligence, l’Université de Salamanca.

     

    Le poète Garcia-Lorca assassiné à Grenade : » On lui a mis deux balles dans le cul à ce pédé ! »

    On n’oublie pas les grands peintres espagnols et dans une scène particulièrement réussie du livre (il s’agit de la visite du musée du Prado) Medianoche, avec sa liberté tout juste retrouvée à Madrid, découvre à sa façon très personnelle, très imprégnée du passé dont il ne parvient pas à se défaire, découvre donc Zurbaran, le Greco, Goya…. On apprend aussi que le directeur du musée du Prado nommé pendant la République était un certain Pablo Picasso. Le livre se termine, Medianoche peut partir. Le passé n’existe plus, avec le village il a été englouti par les eaux du Guadiana. Un nouveau décor est planté : un lac (comme un bleu linceul), de nouveaux personnages, des maisons neuves, un bar…..la vie continue !!!

     

    L’avis de Maria :

     Miguel, un vieil homme, quitte sa maison, fuyant l’arrivée redoutée de sa sœur, pour rejoindre la région où il est né : l’Extremadura, en compagnie de son chien son ami et confident : Ramón. Revenu dans son pays englouti par les eaux d’un barrage, des pans entiers de sa jeunesse surgissent. Dans un style agréable à lire, Carine Fernandez revient sur les années les plus noires qu’ait connu l’Espagne, tout en nous faisant vivre le voyage intérieur de Miguel qui peut enfin se libérer du passé.

     

    L’avis de Françoise H. :

     Medianoche en fuyant l’arrivée de sa sœur qui promet de troubler la torpeur et le confort qu’il s’était ménagé depuis la mort de sa femme, entreprend un retour vers le passé accompagné de son chien Ramón. Cet animal auquel il est très attaché lui permet de supporter son isolement. Il entreprend alors un voyage en Estrémadure, sa région d’origine où il a vécu les années de la guerre et où son frère a été assassiné par les nationalistes après une rafle dans le village. Depuis, il porte en lui la culpabilité du survivant. Son séjour dans le village reconstruit près des ruines du premier englouti sous le lac de barrage créé par Franco, lui permet de réfléchir à son passé, de l’accepter et de regarder enfin le présent. Ce roman parle avec justesse et clarté de l’amitié qui rend supportable toutes les souffrances, de l’amour rendu impossible par la conscience d’appartenir à des classes sociales différentes, de l’Espagne franquiste puis de l’Espagne actuelle où les descendants de ceux qui se sont affrontés cohabitent maintenant et font évoluer ce pays devenu bien différent jusque dans ses paysages.

     

    L’avis de Martine :

     Miguel, alias Medianoche, est un vieux retraité à la gueule tordue, qui vit seul avec son chien dans une cité ouvrière de Madrid où il a passé quarante ans. Une lettre de sa sœur, l’avisant que devenue veuve elle souhaite venir habiter avec lui, le pousse à fuir et à entreprendre un voyage en Estrémadure pour y retrouver son village natal. Mais, là-bas, rien ne ressemble à ce qu’il a connu, son village est enfoui sous les eaux d’un grand lac, et même la végétation n’est plus la même. Il séjourne donc dans un autre village : Castilblanco. Ce voyage réel s’accompagne aussi d’un cheminement intérieur poignant et douloureux, un retour sur son adolescence où il était inséparable de son frère jumeau : Mediodia, arrêté et fusillé à presque dix-huit ans par les nationalistes sous le prétexte d’avoir vandalisé une église. Cette mort dramatique va hanter Medianoche toute sa vie. Même s’il n’était pas présent au moment des faits, il sera arrêté et fera comme il dit : « du tourisme carcéral », notamment dans le terrible camp de Castuera en Estrémadure. Il y connaîtra une magnifique amitié et enfin libéré ira à Madrid où il rencontrera un bel amour qu’il refusera, enfermé dans sa condition sociale. J’ai beaucoup aimé ce livre. Le personnage de Miguel, marqué par la culpabilité du survivant est très émouvant. La guerre d’Espagne avec ses atrocités, ses vies brisées, ses disparus y est largement évoquée, bien qu’après sa fin elle ait provoqué dans le pays une amnésie générale ou citée seulement sous le mot « aquella ». L’écriture est parfois rude mais aussi savoureuse (cf : la visite du musée du Prado), et aussi très évocatrice : on voit, on ressent l’Estrémadure. Ce roman a été un vrai plaisir de lecture.

     

    Carine Fernandez a publié plusieurs romans chez Actes Sud. Longtemps expatriée au Moyen Orient et aux Etats-Unis, elle vit actuellement à Lyon. Pour en savoir plus sur son parcours et son œuvre il faut consulter son site très bien documenté.

     

    « Lettres de mon enfance » Emma Reyes

     L’avis de Janine :

     Emma Reyes est née à Bogota en 1919 et décédée à Bordeaux en 2003. Elle fut une artiste au destin fulgurant. Orpheline, élevée dans un couvent de la capitale colombienne, elle est devenue une peintre de renommée mondiale proche de Frida Kalho et de Diego Rivera qu’elle a fait connaître. En France, où elle a vécu à partir des années soixante, elle a contribué à faire émerger sur la scène artistique une génération entière d’artistes sud-américains. Chevalier des Arts et des Lettres, Emma Reyes laisse derrière elle une œuvre exceptionnelle. Elle était également une conteuse.

    « Lettres de mon enfance » est le récit de vingt-trois lettres inédites adressées à son ami German Arciniegas entre 1969 et 1997 qui racontent son enfance très dure de manière non misérabiliste, mais parfois cocasse, à travers les souvenirs d’une petite fille à l’imagination débordante. Emma et sa sœur Hélène de deux ans son aînée, filles illégitimes, orphelines, ont d’abord été élevées par une prénommée Maria de façon très dure ( corvées d’eau, de pots de chambre…) pour de très petites filles. Au cours d’un déménagement, raconté de manière très drôle, les petites filles étant sur le dos de deux Indiens folkloriques arrivent en retard à la gare et Maria est partie, les abandonnant. Elles sont alors placées dans un couvent pour enfants, elles ont 5 et 7 ans. Les règles y sont très dures, le travail qu’elles fournissent aussi. Emma et Hélène sont inséparables, Hélène protège sa petite sœur. Elles ne voyaient jamais personne de l’extérieur et ignoraient tout du monde. Les sœurs leur inculquaient le péché, l’adoration de Dieu, de la vierge Marie et la crainte du diable. Tout cela faisait partie de leur quotidien avec des punitions très sévères à la clé. Dans cette ambiance rigoureuse se démarque la présence de Carmelita qui n’est pas religieuse, haute en couleurs et à l’histoire vraie. L’arrivée d’une petite nouvelle fascine un groupe de petites filles avec une petite figurine «  Tarrarrurra » qui leur raconte tout ce qui se passe dans le monde et qu’elles croient vivantes. Cette petite nouvelle est renvoyée, traitée de folle et meurt noyée en voulant récupérer sa figurine tombée dans la rivière. Emma est très perturbée par cette annonce et refait pipi au lit, ce qui lui vaut de nombreux châtiments. Ainsi les années s’écoulent et Emma devient la meilleure brodeuse ce qui l’élève à s’occuper de l’aube du pape (qui ne sera pas finie). Par la suite elle travaille auprès de la sacristaine et un jour elle lui vole la clé du portail et s’enfuit, quitte Bogota. Elle ne sait ni lire ni écrire, elle a 19 ans.

    C’est son ami German Arciniegas qui raconte par la suite ses voyages ( Buenos Aires, Montevideo) ainsi que dans la jungle du Paraguay où les guérilleros ont tué son fils. A Buenos Aires, elle gagne le concours international de peinture dont le prix est un voyage à Paris. Sur le livre d’or est inscrit le nom de Picasso. Emma vit à Washington, à Mexico et peint toujours beaucoup. Puis elle s’installe en France à Périgueux avec Jean, son médecin, le grand amour de sa vie, qui deviendra son mari.

    Lettres de mon enfance est un roman inachevé, lu uniquement par Gabriel Garcia Marquez. Il fut publié en 2012 et il est devenu un classique, traduit dans le monde entier.

    L’histoire de cette petite fille cloitrée, maintenue dans la plus grande ignorance du monde, de la culture, mais dotée malgré tout d’un imaginaire extraordinaire, débarquant dans la vie à l’âge de 19 ans m’a passionnée. J’aurais aimé en savoir un peu plus sur la transition et la construction de cette femme, devenue peintre célèbre.

    Emma Reyes commence à peindre en 1943. De ses pérégrinations apparaissent différentes séries.

     

    « Tours et détours de la vilaine fille » Mario Vargas Llosa

     L’avis de Maria :

     C’est l’histoire d’un « amour » qui devient une obsession un peu lassante mais qui parvient à donner envie de finir le livre où se croisent beaucoup d’ambition, de relations destructrices et toujours le retour vers l’homme fidèle et « soumis », obsédé par Lily.

     

    BD « Dolores » Bruno Loth

     L’avis de Maria :

     C’est l’histoire d’un retour sur les origines et la vie de sa mère qui, en maison de retraite semble perdre la tête. Au travers de cette quête, on redécouvre des faits moins connus de la guerre tout en traversant l’Espagne d’aujourd’hui.

    Bruno Loth, auteur de BD français a d’abord travaillé dans la publicité. Ses bandes dessinées, comme «  Ermo » sur la guerre d’Espagne) racontent au travers de personnages souvent fictifs, l’histoire d’un des membres de sa famille lors d’événements qui ont marqué l’Histoire.

     

    BD « Là où se termine la terre » Désirée et Alain Frappier

     L’avis de Maria :

     Au travers de l’enfance et l’adolescence de Pedro, on revit l’histoire du Chili de 1948 à 1970 : la Guerre Froide, la révolution cubaine…et les espoirs qui accompagnent l’élection de Salvador Allende.

    Désirée est journaliste et écrivain. Alain est peintre et illustrateur. Ils travaillent ensemble depuis les années 2000 pour créer des albums. Ce roman graphique est le fruit du témoignage de leur ami Pedro Atias Muños, né à Santiago et exilé en France. Les auteurs ont lancé une participation contributive pour réaliser la suite de ce livre qui nécessiterait de s’immerger plusieurs mois au Chili.

     

    « Une offrande à la tempête » Dolores Redondo

     L’avis de Françoise L. :

     Troisième livre de la trilogie du Batzan. Dans cette vallée, une petite fille décède, étouffée dans son berceau. Une pression a été appliquée sur le visage du bébé. Alors que la police soupçonne le père d’être impliqué, la grand-mère attribue ce meurtre au génie maléfique INGUNA, issu de la mythologie basque. Rapidement cet étrange décès lève le voile sur une série de morts subites et suspectes de nourrissons. L’inspectrice Amalia Salazar décide de se consacrer entièrement à cette nouvelle enquête, au risque de mettre de côté son rôle de mère. Cette enquête la renvoie à sa propre histoire.

    De nouveau on est emporté dans le pays basque espagnol. On est frappé par le rythme énergique de la narration ainsi que par les rebondissements. On s’enfonce dans l’histoire sans frein. On est captivé autant qu’éprouvé et l’on veut connaitre la fin.

     


    votre commentaire
  • Atelier de lecture du 18 janvier 2018

    Chère Martine,

    J'ai été très touchée par votre message et je vous en remercie chaleureusement. C'est une joie de voir mon livre aussi bien reçu et compris. Que cette histoire d'un vieux solitaire - écrite dans la solitude de  mon bureau ! - rencontre de tels lecteurs, je ne peux rien souhaiter de mieux.

      Comme vous, je suis totalement imprégnée de l'Espagne, ce pays auquel les Républicains exilés ont dû s'arracher et je vous dis bravo pour votre action culturelle  à travers La Tertulia.

    Bien sûr, si je passe à Villeneuve  sur Lot, ou dans les environs, je ne manquerais pas d'aller vous voir, promis!

    Bien sincèrement à vous

     Y  un saludo a todos los amigos de La Tertulia.


    Carine Fernandez

     Voici donc en introduction le mail que m’a renvoyé Carine Fernandez faisant suite à celui que je lui avais transmis. C’est une très belle réponse qui suscite vraiment l’envie d’une rencontre future. Alors peut-être un jour ?...... Ce compte-rendu commence donc par les avis de son roman :

     

    « Mille ans après la guerre » Carine Fernandez

     L’avis de Marie-Lou :

     Medianoche et Mediodia, deux jumeaux, vivent dans un petit village d’Extremadure quand éclate la guerre civile. En 1938, Mediodia le bon vivant se fait arrêter et fusiller avec toute la jeunesse républicaine du village, il n’a pas 18 ans ! Son frère jumeau, le héros du livre, a la chance de s’en sortir, momentanément, car il était chez le maréchal ferrant pour la mule. Il se cache quelques mois dans la montagne mais dès qu’il redescend au Pueblo il est pris à son tour et fera le tour des camps de travaux forcés du pays jusqu’en 1948 où il sera libéré. Toute sa vie sera habitée par la présence de son frère jumeau, cette moitié de lui-même qui lui manque tant ! Aujourd’hui il vit seul avec son chien et voilà qu’il décide de revenir au pueblo de sa jeunesse, à l’endroit où a commencé son malheur !...Il voyage dans une Extremadure qu’il ne reconnait plus dans ses paysages, à la recherche d’anciens lieux, d’anciens visages (amis ou ennemis, se demande-t-il en les voyant), il nous explique l’histoire côté Rouge, bien entendu :

     

    La position stratégique de l’Extremadure divisée en deux avec la poche de la Serena et de la Siberia qui résistèrent jusqu’au bout.

     

    La haine historique des communistes envers les anarchistes.

     

    La « vérité » que l’on ne connaitra jamais sur la mort du leader anarchiste mythique Buenaventura Durutti.

     

    La terrible désillusion à la libération de la France, une fois le nazisme renversé : après Paris, Berlin, il y avait Madrid !

     

    Negrin, « Le Planqué », chef du gouvernement espagnol en exil, luxueusement installé à Paris.

     

    Le massacre de Badajoz les 14 et 15 juillet 1936 par le général Yagüe «  le boucher de Badajoz », 4000 personnes, hommes, femmes et enfants massacrés en deux jours dans les arènes.

    Et puis dans ce roman, on nous parle aussi des artistes espagnols :

     

    Le philosophe Unamuno à Salamanca défiant la Phalange et à qui le chef de celle-ci dit : « Muerte a la inteligencia ! Viva la muerte ! » le 12 octobre 1936 dans le temple de l’intelligence, l’Université de Salamanca.

     

    Le poète Garcia-Lorca assassiné à Grenade : » On lui a mis deux balles dans le cul à ce pédé ! »

    On n’oublie pas les grands peintres espagnols et dans une scène particulièrement réussie du livre (il s’agit de la visite du musée du Prado) Medianoche, avec sa liberté tout juste retrouvée à Madrid, découvre à sa façon très personnelle, très imprégnée du passé dont il ne parvient pas à se défaire, découvre donc Zurbaran, le Greco, Goya…. On apprend aussi que le directeur du musée du Prado nommé pendant la République était un certain Pablo Picasso. Le livre se termine, Medianoche peut partir. Le passé n’existe plus, avec le village il a été englouti par les eaux du Guadiana. Un nouveau décor est planté : un lac (comme un bleu linceul), de nouveaux personnages, des maisons neuves, un bar…..la vie continue !!!

     

    L’avis de Maria :

     Miguel, un vieil homme, quitte sa maison, fuyant l’arrivée redoutée de sa sœur, pour rejoindre la région où il est né : l’Extremadura, en compagnie de son chien son ami et confident : Ramón. Revenu dans son pays englouti par les eaux d’un barrage, des pans entiers de sa jeunesse surgissent. Dans un style agréable à lire, Carine Fernandez revient sur les années les plus noires qu’ait connu l’Espagne, tout en nous faisant vivre le voyage intérieur de Miguel qui peut enfin se libérer du passé.

     

    L’avis de Françoise H. :

     Medianoche en fuyant l’arrivée de sa sœur qui promet de troubler la torpeur et le confort qu’il s’était ménagé depuis la mort de sa femme, entreprend un retour vers le passé accompagné de son chien Ramón. Cet animal auquel il est très attaché lui permet de supporter son isolement. Il entreprend alors un voyage en Estrémadure, sa région d’origine où il a vécu les années de la guerre et où son frère a été assassiné par les nationalistes après une rafle dans le village. Depuis, il porte en lui la culpabilité du survivant. Son séjour dans le village reconstruit près des ruines du premier englouti sous le lac de barrage créé par Franco, lui permet de réfléchir à son passé, de l’accepter et de regarder enfin le présent. Ce roman parle avec justesse et clarté de l’amitié qui rend supportable toutes les souffrances, de l’amour rendu impossible par la conscience d’appartenir à des classes sociales différentes, de l’Espagne franquiste puis de l’Espagne actuelle où les descendants de ceux qui se sont affrontés cohabitent maintenant et font évoluer ce pays devenu bien différent jusque dans ses paysages.

     

    L’avis de Martine :

     Miguel, alias Medianoche, est un vieux retraité à la gueule tordue, qui vit seul avec son chien dans une cité ouvrière de Madrid où il a passé quarante ans. Une lettre de sa sœur, l’avisant que devenue veuve elle souhaite venir habiter avec lui, le pousse à fuir et à entreprendre un voyage en Estrémadure pour y retrouver son village natal. Mais, là-bas, rien ne ressemble à ce qu’il a connu, son village est enfoui sous les eaux d’un grand lac, et même la végétation n’est plus la même. Il séjourne donc dans un autre village : Castilblanco. Ce voyage réel s’accompagne aussi d’un cheminement intérieur poignant et douloureux, un retour sur son adolescence où il était inséparable de son frère jumeau : Mediodia, arrêté et fusillé à presque dix-huit ans par les nationalistes sous le prétexte d’avoir vandalisé une église. Cette mort dramatique va hanter Medianoche toute sa vie. Même s’il n’était pas présent au moment des faits, il sera arrêté et fera comme il dit : « du tourisme carcéral », notamment dans le terrible camp de Castuera en Estrémadure. Il y connaîtra une magnifique amitié et enfin libéré ira à Madrid où il rencontrera un bel amour qu’il refusera, enfermé dans sa condition sociale. J’ai beaucoup aimé ce livre. Le personnage de Miguel, marqué par la culpabilité du survivant est très émouvant. La guerre d’Espagne avec ses atrocités, ses vies brisées, ses disparus y est largement évoquée, bien qu’après sa fin elle ait provoqué dans le pays une amnésie générale ou citée seulement sous le mot « aquella ». L’écriture est parfois rude mais aussi savoureuse (cf : la visite du musée du Prado), et aussi très évocatrice : on voit, on ressent l’Estrémadure. Ce roman a été un vrai plaisir de lecture.

     

    Carine Fernandez a publié plusieurs romans chez Actes Sud. Longtemps expatriée au Moyen Orient et aux Etats-Unis, elle vit actuellement à Lyon. Pour en savoir plus sur son parcours et son œuvre il faut consulter son site très bien documenté.

     

    « Lettres de mon enfance » Emma Reyes

     L’avis de Janine :

     Emma Reyes est née à Bogota en 1919 et décédée à Bordeaux en 2003. Elle fut une artiste au destin fulgurant. Orpheline, élevée dans un couvent de la capitale colombienne, elle est devenue une peintre de renommée mondiale proche de Frida Kalho et de Diego Rivera qu’elle a fait connaître. En France, où elle a vécu à partir des années soixante, elle a contribué à faire émerger sur la scène artistique une génération entière d’artistes sud-américains. Chevalier des Arts et des Lettres, Emma Reyes laisse derrière elle une œuvre exceptionnelle. Elle était également une conteuse.

    « Lettres de mon enfance » est le récit de vingt-trois lettres inédites adressées à son ami German Arciniegas entre 1969 et 1997 qui racontent son enfance très dure de manière non misérabiliste, mais parfois cocasse, à travers les souvenirs d’une petite fille à l’imagination débordante. Emma et sa sœur Hélène de deux ans son aînée, filles illégitimes, orphelines, ont d’abord été élevées par une prénommée Maria de façon très dure ( corvées d’eau, de pots de chambre…) pour de très petites filles. Au cours d’un déménagement, raconté de manière très drôle, les petites filles étant sur le dos de deux Indiens folkloriques arrivent en retard à la gare et Maria est partie, les abandonnant. Elles sont alors placées dans un couvent pour enfants, elles ont 5 et 7 ans. Les règles y sont très dures, le travail qu’elles fournissent aussi. Emma et Hélène sont inséparables, Hélène protège sa petite sœur. Elles ne voyaient jamais personne de l’extérieur et ignoraient tout du monde. Les sœurs leur inculquaient le péché, l’adoration de Dieu, de la vierge Marie et la crainte du diable. Tout cela faisait partie de leur quotidien avec des punitions très sévères à la clé. Dans cette ambiance rigoureuse se démarque la présence de Carmelita qui n’est pas religieuse, haute en couleurs et à l’histoire vraie. L’arrivée d’une petite nouvelle fascine un groupe de petites filles avec une petite figurine «  Tarrarrurra » qui leur raconte tout ce qui se passe dans le monde et qu’elles croient vivantes. Cette petite nouvelle est renvoyée, traitée de folle et meurt noyée en voulant récupérer sa figurine tombée dans la rivière. Emma est très perturbée par cette annonce et refait pipi au lit, ce qui lui vaut de nombreux châtiments. Ainsi les années s’écoulent et Emma devient la meilleure brodeuse ce qui l’élève à s’occuper de l’aube du pape (qui ne sera pas finie). Par la suite elle travaille auprès de la sacristaine et un jour elle lui vole la clé du portail et s’enfuit, quitte Bogota. Elle ne sait ni lire ni écrire, elle a 19 ans.

    C’est son ami German Arciniegas qui raconte par la suite ses voyages ( Buenos Aires, Montevideo) ainsi que dans la jungle du Paraguay où les guérilleros ont tué son fils. A Buenos Aires, elle gagne le concours international de peinture dont le prix est un voyage à Paris. Sur le livre d’or est inscrit le nom de Picasso. Emma vit à Washington, à Mexico et peint toujours beaucoup. Puis elle s’installe en France à Périgueux avec Jean, son médecin, le grand amour de sa vie, qui deviendra son mari.

    Lettres de mon enfance est un roman inachevé, lu uniquement par Gabriel Garcia Marquez. Il fut publié en 2012 et il est devenu un classique, traduit dans le monde entier.

    L’histoire de cette petite fille cloitrée, maintenue dans la plus grande ignorance du monde, de la culture, mais dotée malgré tout d’un imaginaire extraordinaire, débarquant dans la vie à l’âge de 19 ans m’a passionnée. J’aurais aimé en savoir un peu plus sur la transition et la construction de cette femme, devenue peintre célèbre.

    Emma Reyes commence à peindre en 1943. De ses pérégrinations apparaissent différentes séries.

     

    « Tours et détours de la vilaine fille » Mario Vargas Llosa

     L’avis de Maria :

     C’est l’histoire d’un « amour » qui devient une obsession un peu lassante mais qui parvient à donner envie de finir le livre où se croisent beaucoup d’ambition, de relations destructrices et toujours le retour vers l’homme fidèle et « soumis », obsédé par Lily.

     

    BD « Dolores » Bruno Loth

     L’avis de Maria :

     C’est l’histoire d’un retour sur les origines et la vie de sa mère qui, en maison de retraite semble perdre la tête. Au travers de cette quête, on redécouvre des faits moins connus de la guerre tout en traversant l’Espagne d’aujourd’hui.

    Bruno Loth, auteur de BD français a d’abord travaillé dans la publicité. Ses bandes dessinées, comme «  Ermo » sur la guerre d’Espagne) racontent au travers de personnages souvent fictifs, l’histoire d’un des membres de sa famille lors d’événements qui ont marqué l’Histoire.

     

    BD « Là où se termine la terre » Désirée et Alain Frappier

     L’avis de Maria :

     Au travers de l’enfance et l’adolescence de Pedro, on revit l’histoire du Chili de 1948 à 1970 : la Guerre Froide, la révolution cubaine…et les espoirs qui accompagnent l’élection de Salvador Allende.

    Désirée est journaliste et écrivain. Alain est peintre et illustrateur. Ils travaillent ensemble depuis les années 2000 pour créer des albums. Ce roman graphique est le fruit du témoignage de leur ami Pedro Atias Muños, né à Santiago et exilé en France. Les auteurs ont lancé une participation contributive pour réaliser la suite de ce livre qui nécessiterait de s’immerger plusieurs mois au Chili.

     

    « Une offrande à la tempête » Dolores Redondo

     L’avis de Françoise L. :

     Troisième livre de la trilogie du Batzan. Dans cette vallée, une petite fille décède, étouffée dans son berceau. Une pression a été appliquée sur le visage du bébé. Alors que la police soupçonne le père d’être impliqué, la grand-mère attribue ce meurtre au génie maléfique INGUNA, issu de la mythologie basque. Rapidement cet étrange décès lève le voile sur une série de morts subites et suspectes de nourrissons. L’inspectrice Amalia Salazar décide de se consacrer entièrement à cette nouvelle enquête, au risque de mettre de côté son rôle de mère. Cette enquête la renvoie à sa propre histoire.

    De nouveau on est emporté dans le pays basque espagnol. On est frappé par le rythme énergique de la narration ainsi que par les rebondissements. On s’enfonce dans l’histoire sans frein. On est captivé autant qu’éprouvé et l’on veut connaitre la fin.

     

     

     


    votre commentaire
  • Atelier de lecture du 14 décembre 2017

    « Deux hommes de bien » Arturo Perez- Reverte

    L’avis de Josette :

    C’est en faisant des recherches dans l’Académie Royale d’Espagne, que Perez-Reverte découvre par hasard les vingt-huit volumes de l’édition originale de « l’Encyclopédie » parue de 1751 à 1772. Interdite en Espagne, comment y est-elle parvenue ? Tout le monde l’ignore. Des archives retrouvées (dont le précieux journal de voyage laissé par l’un des deux académiciens) ainsi que des recherches personnelles de l’auteur (cartes, plans, récits de l’époque…) vont aboutir à « document-roman ».

    A la fin du XVIIIème siècle, les membres de l’Académie Royale d’Espagne décident d’acquérir, malgré l’opposition virulente de l’Eglise omnipuissante, cette « Encyclopédie » dont on parle tant. Ils sont soutenus dans ce projet par le roi Charles III lui-même. Deux Académiciens, le bibliothécaire, fervent catholique, et l’amiral Zarate, plutôt athée, sont chargé de cette mission. Après un très long voyage inconfortable et semé d’embûches, ils arrivent à Paris où l’abbé Bringas, un prêtre aux idées très radicales, va leur servir de guide. Nos deux Académiciens découvrent alors une ville brillante, à la pointe de la mode. Ils sont reçus dans les salons où ils rencontrent de grands esprits (Buffon, Laclos…), où l’on parle de littérature, découvertes scientifiques…Mais l’abbé Bringas n’oublie pas de les amener dans d’autres lieux moins accueillants : les rives de la Seine où vivent dans des conditions d’extrême pauvreté une grande partie des Parisiens et où se propagent des idées de mécontentement et de révolte. Ajoutons que nos Académiciens ignorent être suivis par un espion espagnol qui doit empêcher l’Encyclopédie, s’ils parviennent à la trouver, d’arriver jusqu’à Madrid.

    J’ai pris un très grand plaisir à lire ce livre. Je pourrais dire que je l’ai « dégusté » grâce au style de l’auteur qui reconstitue avec une précision minutieuse chaque instant de cette aventure courageuse et extraordinaire.

     

    « Tours et détours de la vilaine fille » Mario Vargas Llosa

    L’avis de Martine :

    « Tours et détours de la vilaine fille » c’est Ricardo et Lily emportés dans le tourbillon de la vie, comme dans la chanson : « Elle dansait avec une voix qui sitôt m’enjôla. Y avait l’ovale de son visage pâle de femme fatale qui m’fut fatale. » Et c’est sûr que Lily fut fatale à Ricardo ! Il la connut à quinze ans, en tomba raide amoureux, d’un amour fou qui va durer quarante ans. Elle avait une drôle de personnalité Lily : déjà, adolescente, elle mystifia la bande d’adolescents insouciants des beaux quartiers en se prétendant Chilienne. Mais, démasquée, elle disparut avec sa sœur. Ricardo, lui, a un rêve : vivre à Paris. Il y part étudier et sa vie d’étudiant pauvre évolue lorsqu’il obtient un poste de traducteur. Et c’est à Paris qu’il la retrouve en future guérillera cubaine et lui propose de l’épouser pour la première fois…Mais elle disparaît pour la seconde fois. Et toute la vie va se dérouler ainsi. Ricardo va retrouver Lily sous de multiples identités, dans de multiples lieux toujours à la recherche d’une vie brillante et argentée. Et, chaque fois, Ricardo poursuit l’objet de son amour, la retrouve et la perd.

    J’ai eu du mal à rentrer dans ce roman qui m’a paru superficiel d’autant plus que le personnage de Ricardo me paraissait être le benêt amoureux, sans consistance. Mais n’est-il pas aussi l’archétype du héros romantique pur et désintéressé ? « Désintéressé » est le qualificatif qui convient le moins à Lily. Aventurière, arriviste, sans scrupule, égoïste, avide de luxe et de vie facile, elle n’attire pas l’empathie. Mais, pourtant, tout n’est pas si simple et je me suis laissée entraîner jusqu’à une fin qui a justifié mon intérêt. Cette fin illumine tout le roman !

     

    « Le vieux qui lisait des romans d’amour » Luis Sepulveda

    L’avis de Jeanine :

    El Idilio est un petit village aux portes de la forêt amazonienne, un enfer vert peuplé de chercheurs d’or, d’aventuriers de tout poil, en quête d’un Eldorado imaginaire, d’indiens Jivaros rejetés par leur peuple. La découverte par les indiens shuars d’un cadavre d’hommes blond atrocement mutilé met le feu au village. Malgré les accusations hâtives du maire qui désigne les indiens, Antonio José Bolivar diagnostique dans cette mort non pas la main de l’homme mais la griffe d’un fauve… Le vieil homme aguerri et initié aux mystères de la forêt et grand lecteur de romans sentimentaux se voit bientôt contraint de se lancer dans une chasse de tous les dangers. Ce roman, loin de nous donner une définition du paradis, décrit l’Amazonie comme un lieu cruel et hostile. L’auteur y invite à une réflexion portant sur l’écologie et l’étude de l’âme humaine.

    L’initiation du vieil homme à la vie des shuars avec lesquels il vit un certain temps, leurs règles, leur approche de la forêt et des animaux, est particulièrement intéressant. Humour, poésie, découverte de la forêt amazonienne sont les atouts de ce court roman. Ce roman a été salué par une critique internationale et a obtenu plusieurs prix. L’auteur est né en 1949 dans le nord du Chili. Etudiant, il est emprisonné sous le régime de Pinochet pendant deux ans et demi. Libéré puis exilé, il voyage à travers l’Amérique latine et fonde des groupes de théâtre en Equateur, au Pérou et en Colombie. En 1978, il participa à une recherche de l’UNESCO et passe un an chez les indiens shuars. En 1982, il s’installe en Allemagne. Depuis 1996, il vit dans le nord de l’Espagne à Gijón. Ses œuvres ont été couronnées de nombreux prix.

     

    « Le bruit des choses qui tombent » Juan Gabriel Vasquez

    L’avis de Maria :

    L’auteur est né à Bogota en 1973. Après des études à la Sorbonne, il va vivre en Belgique avant de s’installer à Barcelone. Son premier roman «  Les Dénonciateurs », paru en 2008 et dont nous avons beaucoup parlé au sein de l’atelier, lui a valu une reconnaissance internationale. En 1991, il a obtenu le prix Roger-Caillois qui récompense un auteur latino-américain et un auteur francophone pour ce roman.

    A quarante ans, Antonio Yammara veut comprendre : blessé lors de l’assassinat de son ami Ricardo Laverde avec lequel il a entretenu une courte relation mais lourde de conséquences, il dresse le bilan de sa vie et, traumatisé, il voit son rapport au monde se détériorer malgré l’attachement qu’il a pour sa femme et sa fille. La prise de contact de Maya, fille de Ricardo Laverde, lui permet de remonter le temps. Tous deux se replongent dans les années 70, ces années sombres de la drogue et de la violence en Colombie et plus particulièrement à Bogota.

    A propos de la violence, l’auteur souligne dans un entretien en décembre 2012, que si elle s’est déplacée au Mexique, le trafic de drogue reste très actif en Colombie.

     

    « Sa seigneurie » Jaume Cabré

    L’avis de Maria :

    1799 : une cantatrice française est retrouvée morte et mutilée dans sa chambre d’hôtel à Barcelone. Un coupable est vite fabriqué pour masquer les faits du régent de la ville : Don Rafel Masso, autrement nommé Sa Seigneurie. Dans ce roman, Jaume Cabré, (auteur que nous connaissons bien), brosse le portrait d’une société corrompue dans les derniers jours du XVIIIème siècle.

     

    « La position du pion » Rafael Reig

    L’avis de Martine :

    Voici un roman qui m’a donné un peu de fil à retordre. J’ai trouvé son début un peu confus mais peu à peu, au fil de la lecture, je me suis sentie prise au sein d’un roman intelligent, fin et subtil. J’ai laissé de côté tout ce qui était vocabulaire technique dans cette partie d’échecs calamiteuse qui se déroule tout au long du livre, métaphore de la vie des protagonistes de l’histoire. Ces derniers n’ont été après tout que des révolutionnaires de pacotille et sont devenus les bourgeois qu’étaient leurs parents, bourgeois qui veulent être « là où ça se passe ». Johnny, le rejeton lucide de cette génération, cherche l’homme qui est son vrai père et enquête sur le meurtre jamais résolu d’un de ses amis d’enfance .Et, à travers cette enquête, il tire sur le fil de la pelote qui va dérouler et éclairer les étapes de la vie de ces couples d’amis qui ont «  réussi ». On passe ainsi de l’Espagne franquiste des années soixante à celle de la transition démocratique du début du règne de Juan Carlos, puis à l’Espagne de la Movida des années 80. Et donc, on assiste au changement de vie de ces ex-militants communistes.. L’auteur se montre impitoyable, ironique et cynique mais aussi pince sans rire. Il signe là un roman original où l’on trouve aussi de l’émotion et de la tendresse.


    votre commentaire
  • Atelier de lecture du 16 novembre 2017

     

    «  Tanguy, histoire d’un enfant d’aujourd’hui » Michel del Castillo

    L’avis de Françoise H :

    Ce roman autobiographique raconte l’enfer vécu par l’auteur pendant son enfance. Rejeté et abandonné par ses parents, il est envoyé le jour de ses neuf ans, en 1942, dans un camp de concentration en Allemagne où il vit dans des conditions abominables. A son retour, dans l’impossibilité de retrouver ses parents, il est interné en Espagne dans un centre de redressement tenu par des religieux extrêmement durs et sadiques. Il est de nouveau soumis aux sévices et aux privations et il réussit à s’enfuir alors qu’il a environ 17 ans. Il trouve enfin chaleur et réconfort dans un collège de Jésuites dirigé par un homme remarquable. Au sein de cet univers bienveillant, il peut commencer des études brillantes et prendre en main sa vie d’adulte. En lisant ce livre on se demande comment un enfant peut endurer tant de souffrances. C’est un ouvrage remarquable qui compte pour sa qualité et son intensité.

     

    « Petits papiers au gré du vent » Eduardo Sacheri

    L’avis de Françoise H :

    Ce livre a pour thème les liens très forts qui unissent depuis l’enfance quatre garçons du même quartier. Il a l’intérêt de décrire le milieu du foot en Argentine dont c’est l’une des patries et non des moindres…Les joueurs peuvent y être achetés par des particuliers…dans le seul but d’investir et de spéculer à condition que le joueur, gladiateur des temps modernes, soit à la hauteur des espérances de ses propriétaires. Ce roman bien écrit dévoile aussi le machisme de ce milieu et au-delà. Les femmes y sont décrites comme des objets, exceptée Guadalupe, l’enfant de l’ami disparu, pour qui les trois compères s’emploient à assurer l’avenir.

     

    « La chair » Rosa Montero

    L’avis de Françoise H :

    Soledad, la bien nommée, est en effet bien seule. Elle a fait le choix de privilégier sa carrière et de garder un physique irréprochable. Tout est sous contrôle ! Mais à l’aube de la soixantaine un grain de sable vient gripper les rouages…Ce sera finalement la révélation que l’abnégation et l’altruisme peuvent aussi apporter une autre sorte de bonheur.

    « Beatriz... Une vie comme un roncier d'Amour »  Catherine Berenguer Joly

    Présentation de l'éditeur :

    L'auteur : Retraitée de l'enseignement, Catherine Berenguer Joly aime l'écriture qui est pour elle "le chemin de la délivrance et de la liberté intérieure". Membre de la "Société des poètes français", elle a édité plusieurs recueils de poèmes, un livre de nouvelles et un livre d'Histoire : "Pujols le Haut, village d'Occitanie"

    Le livre : Le thème de ce livre ? L'histoire d'une famille qui quitte l'Espagne franquiste en 1953, l'auteur raconte les joies et les déboires de cette famille avant et après l'arrivée en France et comment leur petite fille peut s'intégrer grâce à l'ouverture d'esprit, à l'humanisme et à la générosité de l'école publique française.... C'est aussi le chemin de l'évolution, envers et contre tout, d'une petite fille nourrie de l'amour de sa mère. C'est une écriture optimiste et courageuse qui évite la pleurnicherie et le misérabilisme !!

    L’avis de Françoise H :

    En nous contant l'histoire de Marie petite espagnole devenue française après son exil en France à l'âge de treize ans, l'auteur, avec une grande sensibilité dévoile comment s'est construit la personnalité d'une femme courageuse, généreuse, profondément humaine, ouverte sur le monde et la connaissance. 

    Elle rend hommage aux mères qui, comme Béatriz  par leur soutien et leur amour protègent et aident leurs enfants à surmonter des drames comme la violence et l'exil pour se forger un avenir meilleur que le leur.

    Par sa reconnaissance envers l'école, elle rend aussi hommage aux enseignants qui par leur humanité ont su encourager Marie comme tant d'autres enfants de familles immigrées modestes afin de leur permettre de poursuivre des études.

    Chaque descendant de famille exilée se reconnaîtra  dans ce récit avec cette difficile adaptation à une nouvelle vie, un nouveau climat, une nouvelle langue, d'autres mentalités. C'est aussi un message d'espoir pour les enfants qui continuent d'arriver chez nous, puissent-ils trouver un accueil digne et une nouvelle chance.

    Ce livre est une véritable leçon de vie. 

     


    votre commentaire
  • Atelier de lecture du 19 octobre 2017

     

    « La fin de l’histoire » Luis Sepulveda

    L’avis de Josette :

    Auteur chilien né en 1949. Etudiant, il a été emprisonné sous le régime de Pinochet. Libéré, il s’exile et voyage à travers l’Amérique du Sud, passe un an chez les Indiens Shuars et écrit »Le vieux qui lisait des romans d’amour ». Il est traduit dans cinquante pays. Il vit actuellement en Asturies.

    Le thème : Juan Belmonte vit en Patagonie auprès de sa compagne très traumatisée (muette) après avoir subi les tortures de Pinochet. Contacté par les services secrets russes qui connaissent ses talents de sniper, il accepte de partir à la recherche d’un certain Cosaque russe qui a activement collaboré avec Pinochet.

    L’avis : Le début du livre m’a paru assez touffu puis une fois les personnages bien déterminés, il devient passionnant, retraçant les relations historiques entre la Russie, l’Allemagne hitlérienne, le Chili au cours du vingtième siècle. « La littérature raconte ce que l’histoire officielle dissimule » Luis Sepulveda.

    «  Sa Seigneurie » Jaume Cabre

    L’avis de Josette :

    L’action se déroule de novembre 1899 au premier janvier 1900 dans une Barcelone pluvieuse, boueuse mais très occupée à préparer avec éclat l’arrivée de l’an 1900, surtout dans les hautes instances du pouvoir. Qui aura la meilleure place ?

    Don Rafel Masso i Pujades en tant que régent civil de l’Audience Royale de Barcelone est chargé de prononcer les sentences criminelles et de les faire exécuter. Très imbu de son titre, jalousé par les autres dignitaires du pouvoir (police, justice), il se livre à deux occupations principales : « paraître » lors des réunions officielles et, étant féru d’astronomie, observer grâce à sa lunette d’astronomie le ciel…et les belles rondeurs d’une charmante voisine. Cette routine agréable va être troublée par l’assassinat d’une cantatrice française. Heureusement un coupable idéal va être rapidement trouvé. La sérénité de sa Seigneurie en sera-t-elle modifiée ? Loin de « Confiteor » Cabré nous fait ici une description délicieuse mais satirique et mordante d’une société riche de son inculture et entièrement corrompue. Un vrai plaisir de lecture !!!!

     

    « Monte perdido » Augustin Martinez

    L’avis de Janine :

    Deux fillettes de onze ans disparaissent un soir en rentrant du collège. Cinq ans plus tard est retrouvée une voiture accidentée dans un ravin et le cadavre d’un homme avec une des deux fillettes, devenue adolescente, à ses côtés. L’espoir revient dans les familles rongées par le chagrin. Les enquêteurs se heurtent à une communauté fermée sur elle-même dans ce petit village appelé « Monteperdido ». L’histoire va de rebondissements en rebondissements poignants et haletants, au sein de plusieurs vallées pyrénéennes aragonaises, sublimement décrites. Les études psychologiques sont également intéressantes, notamment celle de l’enquêtrice à l’enfance perturbée.

     

    « Le port secret » Maria Bruña

    L’avis de Janine :

    Un jeune anglo-espagnol revient à Santander avec l’idée de transformer la vieille demeure héritée de sa mère en hôtel de charme. Pendant les travaux, le cadavre d’un bébé est découvert, il semble dater de la guerre civile. Le livre se déroule alors sur deux périodes : l’actuelle avec l’enquête et celle ancienne qui relate la vie d’une famille pendant la guerre civile, les deux périodes s’entrecroisant avec rencontres, amours, secrets de famille. Ce polar, qui est captivant, se déroule sur la côte cantabrique que l’auteur décrit magnifiquement. On y retrouve sa beauté, sa côte sauvage.

    Maria Bruña est née à Vigo en 1976. Elle est avocate en droit du travail. « Le port secret » est son premier roman noir.

     

    «  Au cinq rues Lima » Mario Vargas Llosa

    L’avis de Martine :

    Un homme d’affaires puissant, son avocat et meilleur ami, leurs deux épouses, un directeur de journal de caniveau, une de ses journalistes, un ancien déclameur de poésies, un photographes, tels sont les principaux protagonistes bien campés de cette comédie de mœurs. En toile de fond, le régime dictatorial de Fujimori soutenu par son âme damnée, le chef de la police politique surnommé « Le docteur », manipule, menace, emprisonne…. Mais quels liens entretiennent tous ces personnages ?

    • Le photographe réalise un soir, au cours d’une orgie, des clichés très compromettants du puissant ingénieur Cardenas.

    • Comme il est le photographe du journal « Strip-tease », il les livre, au bout de deux ans, à son directeur qui décide de les publier.

    • Gros scandale, affolement, défense de l’avocat.

    • Le directeur du journal est alors assassiné et l’ingénieur accusé.

    • La journaliste du journal, surnommée « La Riquiqui » décide courageusement et de manière très futée de mener l’enquête : qui est vraiment l’assassin ?

    • Et le déclameur dans tout cela ? Dézingué des années auparavant par le journal, et rêvant de vengeance, il perd sa mémoire ce qui va être très pratique pour…

    • Quant aux épouses, dans la vacuité de leur existence, elles satisfont leur esprit de découverte dans un certain domaine…

    Ce n’est pas le meilleur roman de l’auteur. C’est une œuvre légère, une comédie de mœurs malicieuse mais aux multiples rebondissements. Vargas Llosa a dû se faire plaisir en l’écrivant…Mais en toile de fond, on y trouve la description d’une bourgeoisie puissante, hypocrite, ne vivant que pour son plaisir ainsi qu’un pays abîmé par une dictature où le terrorisme et les enlèvements impliquent un couvre-feu et une police puissante et dévoyée. Dans le chapitre XX, l’auteur fait preuve de beaucoup de maîtrise littéraire. Même si ce livre m’a paru léger, j’ai pris du plaisir à le lire et je pense que l’on peut accorder à un prix Nobel de littérature le droit de s’amuser.

     


    votre commentaire
  • Atelier de lecture du 19 octobre 2017

     

    « La fin de l’histoire » Luis Sepulveda

    L’avis de Josette :

    Auteur chilien né en 1949. Etudiant, il a été emprisonné sous le régime de Pinochet. Libéré, il s’exile et voyage à travers l’Amérique du Sud, passe un an chez les Indiens Shuars et écrit »Le vieux qui lisait des romans d’amour ». Il est traduit dans cinquante pays. Il vit actuellement en Asturies.

    Le thème : Juan Belmonte vit en Patagonie auprès de sa compagne très traumatisée (muette) après avoir subi les tortures de Pinochet. Contacté par les services secrets russes qui connaissent ses talents de sniper, il accepte de partir à la recherche d’un certain Cosaque russe qui a activement collaboré avec Pinochet.

    L’avis : Le début du livre m’a paru assez touffu puis une fois les personnages bien déterminés, il devient passionnant, retraçant les relations historiques entre la Russie, l’Allemagne hitlérienne, le Chili au cours du vingtième siècle. « La littérature raconte ce que l’histoire officielle dissimule » Luis Sepulveda.

    «  Sa Seigneurie » Jaume Cabre

    L’avis de Josette :

    L’action se déroule de novembre 1899 au premier janvier 1900 dans une Barcelone pluvieuse, boueuse mais très occupée à préparer avec éclat l’arrivée de l’an 1900, surtout dans les hautes instances du pouvoir. Qui aura la meilleure place ?

    Don Rafel Masso i Pujades en tant que régent civil de l’Audience Royale de Barcelone est chargé de prononcer les sentences criminelles et de les faire exécuter. Très imbu de son titre, jalousé par les autres dignitaires du pouvoir (police, justice), il se livre à deux occupations principales : « paraître » lors des réunions officielles et, étant féru d’astronomie, observer grâce à sa lunette d’astronomie le ciel…et les belles rondeurs d’une charmante voisine. Cette routine agréable va être troublée par l’assassinat d’une cantatrice française. Heureusement un coupable idéal va être rapidement trouvé. La sérénité de sa Seigneurie en sera-t-elle modifiée ? Loin de « Confiteor » Cabré nous fait ici une description délicieuse mais satirique et mordante d’une société riche de son inculture et entièrement corrompue. Un vrai plaisir de lecture !!!!

     

    « Monte perdido » Augustin Martinez

    L’avis de Janine :

    Deux fillettes de onze ans disparaissent un soir en rentrant du collège. Cinq ans plus tard est retrouvée une voiture accidentée dans un ravin et le cadavre d’un homme avec une des deux fillettes, devenue adolescente, à ses côtés. L’espoir revient dans les familles rongées par le chagrin. Les enquêteurs se heurtent à une communauté fermée sur elle-même dans ce petit village appelé « Monteperdido ». L’histoire va de rebondissements en rebondissements poignants et haletants, au sein de plusieurs vallées pyrénéennes aragonaises, sublimement décrites. Les études psychologiques sont également intéressantes, notamment celle de l’enquêtrice à l’enfance perturbée.

     

    « Le port secret » Maria Bruña

    L’avis de Janine :

    Un jeune anglo-espagnol revient à Santander avec l’idée de transformer la vieille demeure héritée de sa mère en hôtel de charme. Pendant les travaux, le cadavre d’un bébé est découvert, il semble dater de la guerre civile. Le livre se déroule alors sur deux périodes : l’actuelle avec l’enquête et celle ancienne qui relate la vie d’une famille pendant la guerre civile, les deux périodes s’entrecroisant avec rencontres, amours, secrets de famille. Ce polar, qui est captivant, se déroule sur la côte cantabrique que l’auteur décrit magnifiquement. On y retrouve sa beauté, sa côte sauvage.

    Maria Bruña est née à Vigo en 1976. Elle est avocate en droit du travail. « Le port secret » est son premier roman noir.

     

    «  Au cinq rues Lima » Mario Vargas Llosa

    L’avis de Martine :

    Un homme d’affaires puissant, son avocat et meilleur ami, leurs deux épouses, un directeur de journal de caniveau, une de ses journalistes, un ancien déclameur de poésies, un photographes, tels sont les principaux protagonistes bien campés de cette comédie de mœurs. En toile de fond, le régime dictatorial de Fujimori soutenu par son âme damnée, le chef de la police politique surnommé « Le docteur », manipule, menace, emprisonne…. Mais quels liens entretiennent tous ces personnages ?

    • Le photographe réalise un soir, au cours d’une orgie, des clichés très compromettants du puissant ingénieur Cardenas.

    • Comme il est le photographe du journal « Strip-tease », il les livre, au bout de deux ans, à son directeur qui décide de les publier.

    • Gros scandale, affolement, défense de l’avocat.

    • Le directeur du journal est alors assassiné et l’ingénieur accusé.

    • La journaliste du journal, surnommée « La Riquiqui » décide courageusement et de manière très futée de mener l’enquête : qui est vraiment l’assassin ?

    • Et le déclameur dans tout cela ? Dézingué des années auparavant par le journal, et rêvant de vengeance, il perd sa mémoire ce qui va être très pratique pour…

    • Quant aux épouses, dans la vacuité de leur existence, elles satisfont leur esprit de découverte dans un certain domaine…

    Ce n’est pas le meilleur roman de l’auteur. C’est une œuvre légère, une comédie de mœurs malicieuse mais aux multiples rebondissements. Vargas Llosa a dû se faire plaisir en l’écrivant…Mais en toile de fond, on y trouve la description d’une bourgeoisie puissante, hypocrite, ne vivant que pour son plaisir ainsi qu’un pays abîmé par une dictature où le terrorisme et les enlèvements impliquent un couvre-feu et une police puissante et dévoyée. Dans le chapitre XX, l’auteur fait preuve de beaucoup de maîtrise littéraire. Même si ce livre m’a paru léger, j’ai pris du plaisir à le lire et je pense que l’on peut accorder à un prix Nobel de littérature le droit de s’amuser.

     

     


    votre commentaire


    Suivre le flux RSS des articles de cette rubrique
    Suivre le flux RSS des commentaires de cette rubrique