• Atelier-lecture

    Depuis le 25 septembre 2014, La Tertulia s'est enrichie d'un atelier-lecture, les livres dont nous discutons sont mentionnés dans les comptes-rendus de cette rubrique et certains font l'objet d'un article dans la partie livres de ce blog (cliquer ici pour y accéder).

    L'atelier-lecture de la Tertulia a pour but de réunir tous les membres de l'association qui aiment lire pour leur permettre d'échanger sur leurs coups de cœur, leurs émotions, leurs opinions et leur plaisir en toute convivialité (sur la littérature en rapport avec le monde hispanique).

    Atelier-lecture

    LIVRES EN FRANCAIS EN CIRCULATION (certains font déjà l'objet d'un article, cliquer sur le titre souligné pour y accéder)

    Liste mise à jour et enrichie de liens régulièrement

     Si vous êtes intéressés par nos réunions qui ont lieu un jeudi après-midi par mois, laissez un commentaire avec vos coordonnées ou contactez-nous par courriel pour connaître le lieu de réunion : assoc.tertulia@hotmail.fr

     

    Principaux Auteurs et autrices lus et commentés par l’atelier lecture

    Fernando Aramburu

    Victor del Arbol

    Miguel Bonnefoy

    Maria Bruna

    Jaume Cabre

    Javier Cercas

    Ildefonso Falcones

    Caryl Ferey

    Carine Fernandez

    Almudena Grandes

    Cathy Berenguer Joly

    Maria Larrea

    Javier Maria

    Gabriel Garcia Marquez

    Tomas Eloy Martinez

    Aro Sainz de la Maza

    Jose Maria Merinos

     

    Rosa Montero

    Javier Moro

    Elsa Osorio

    Leonardo Padura

    Leonor de Recondo

    Dolores Redondo

    Arturo Perez Reverte

    Emma Reyes

    Eduardo Sachieri

    Clara Sanchez Luis Sepulveda

    Enrique Serna

    Carla Suarez

    Ignacio del Valle

    Juan Gabriel Vasquez

    Carlos Ruiz Zafon

     

    Titre

    Auteur

    Titre

    Auteur

    Adios Hemingway

    Leonardo Padura

    La vie quand elle était à nous

    Marian Izaguirre

    Ainadamar

    Serge Mestre

    La vie rêvée d'Ernesto G

    JM Guénassia

    Amado Amo

    Rosa Montero

    La vie rêvée d'Ernesto G

    JM Guénassia

    Amour, Prozac et autres curiosités

    Lucía Etxebarria

    La ville des prodiges

    Eduardo Mendoza

    Anatomie d'un instant

    Javier Cercas

    La víspera de casi todo

    Victor del Arbol

    Attends-moi au ciel

    Carlos Salem

    Le bourreau de Gaudi

    Aro Sainz de la Maza

    Aux cinq rues, Lima

    Mario Vargas Llosa

    Le bruit des choses qui tombent

    Juan Gabriel Vasquez

    Avril rouge

    Santiago Roncagliolo

    le cercle des douze

    Pablo de santis

    Batailles de chat

    Eduardo Mendoza

    Le cœur cousu

    Carole Martinez

    Beatriz... Une vie comme un roncier d'amour

    Cathy Joly

    Le crayon du charpentier

    Manuel Rivas

    Beatriz... Une vie comme un roncier d'amour

     

    Le dernier Paradis

    Antonio Garrido

    ça aussi ça passera

    Milena Busquets

    Le reste est silence

    Carla Guelfenbein

    Cádiz ou la diagonale du fou

    Arturo Pérez reverte

    Le ruban rouge

    Carmen Posadas

    Ce que cache ton nom

    Clara Sanchez

    Le sortilège espagnol

    Michel del Castillo

    Ce que cache ton nom

    Clara Sánchez

    Le sourire étrusque 

    José Luis Sampedro

    Ce que je sais de Vera Candida

    Veronique Oualde

    Le tango des assassins

    Maud Tabachnik

    Ce qui désirait arriver

    Leonardo Padura

    Le vieux qui lisait des romans d'amour

    Luis Sépulveda

    Cent ans de solitude

    G Garcia Marquez

    Le voyage d'Octavio

    Miguel Bonnefoy

    Cher diego...

    Elena Poniatowska

    Les brumes du passé

    Leonardo Padura

    Codex 632-Le secret de Christophe Colomb

    JR Dos Santos

    Les démons de Berlin

    Ignacio del Valle

    Coltan 

    A Vasquez Figueroa

    Les dénonciateurs

    Juan Gabriel Vasquez

    Comme les amours

    Javier Marías

    Les dieux du tango

    Carolina de robertis

    Condor

    Carryl Ferrey

    Les fantômes de Goya

    J.C. Carrière

    Confiteor

    Jaume Cabre

    Les muselés

    Aro Sainz de la Maza

    D'amour et d'ombre

    Isabel Allende

    Les réputations

    Juan Gabriel Vasquez

    Dans l'épaisseur de la chair

    JM Blas de Robles

    Les révoltes de Cordoue

    Ildefonso falcones

    Dans la grande nuit des temps

    Antonio Muñoz Molina

    Les soldats de Salamine

    Javier Cercas

    Dark

    Edgardo coazarinsky

    Les voix du Pamano

    Jaume Cabre

    De chair et d'os

    Dolores Redondo

    Les yeux fardés

    Lluis Llach

    Demain à Sainte Cécile

    Maria Dueñas

    Lettres de mon enfance

    Emma Reyes

    Derrière les portes closes

    Care Santos

    Luz ou le temps sauvage

    Elsa Osorio

    Derrière les portes closes

    Care Santos

    Luz ou le temps sauvage

    Elsa Osoria

    Des morts bien pires

    Francisco Gonzalez L

    Mala vida

    Marc Fernandez

    Deux hommes de biens

    Arturo Perez Reverte

    Mille ans après la guerre

    Carine Fernandez

    Dime quien soy

     

    Mille ans après la guerre

    Carine Fernandez

    Dolorès

    Bruno Loth

    Moi, chevalier Deon, espionne du roi

    Catherine Hernary-vieille

    Dora Maar

    Alicia Dujovne Ortiz

    Moi, Victoria, enfant volé de la dictature argentine 

    Victoria Donda

    El enigma de la calle Calabría

    Jeronimo Tristante

    Monastère

    Eduardo Halfon

    El rojo y el azul

    Jéronimo Tristante

    Mourir à Saragosse

    Michel Peyramaure

    Empereurs des ténèbres

    Ignacio del vaĺle

    Mourir et puis sauter sur son cheval

    David Bosc

    En attendant Bojangles

    Olivier Bourdeaux

    Nada

    Carmen Laforêt

    En fugue

    William Navarrete

    Nora ou le paradis perdu

    Cecilia San Martin

    Entre dans ma vie

    Clara Sanchez

    Par delà la pluie

    Victor del Arbol

    Eva (en espagnol)

    Arturo Perez Reverte

    Pas pleurer

    Lydie Salveyre

    Falcó

    Arturo Perez Reverte

    Pedro Paramo

    Juan Rulfo

    Fille du destin

    Isabel Allende

    Petits papiers au gré du vent

    Eduardo Sacheri

    Frida 

    Hayden HERRERA

    Pleine lune

    Antonio Muñoz Molina

    Helena

    Julian Ayesta

    Plus jamais ca

    Trapiello

    Hérétiques

    Leonardo Padura

    Point Cardinal

    Leonor de Recondo

    Hérétiques

    Leonardo Padura

    Point cardinal

    Leonor de Recondo

    Hombres buenos

    Arturo Perez Reverte

    Poussière d'Exil

    Patrick Bard

    Immortelle randonnée

    J. CH. Ruffin

    Quelques nuages

    Paco Ignacio Taibo

    Intempérie

    Jésus CARRASCO

    Qui a tué Palomino Molero

    M Vargas Llosa

    Journal d'un enlèvement

    G García Marquez

    Rêves oubliés

    Leonor de Redondo

    L'affaire Jane de Bay

    Simone Célin

    Sa seigneurie

    Jaume Cabré

    L'appât

    José Carlos Somoza

    Sabotage

    Arturo Perez Reverte

    L'art de voler

    Antonio Altarriba

    Santa Evita

    Tomás Eloy Martínez

    L'empereur aux mille conquêtes

    Javier Moro

    Solstice

    José Carlos Llop

    L'empereur aux mille conquêtes

    Javier Moro

    Tango

    Elsa Osorio

    L'espionne deTanger

    Maria Duenas

    Tanguy

    Michel Del Castillo

    L'hiver à Lisbonne

    Antonio Muñoz Molina

    Tempête sur Panama

     

    L'homme qui aimaient les chiens

    Leonardo Padura

    The yankee comandante

    David Grann

    L'imposteur

    Javier Cercas

    Todo esto te daré

     

    L'ombre de l'eunuque

    Jaume Cabre

    Tours et détours de la vilaine fille

    M Vargas Llosa

    L'oubli que nous serons

    Hector Abad

    Tout est silence

    Manuel Rivas

    La capitana

    Elsa Osorio

    Tout est silence

    Clara Suarez

    La cathédrale de la mer

    Ildefonso Falcones

    Toutes les vagues de l'océan

    Victor del Arbol

    La chair

    Rosa Montero

    Un amour fou

    Cath.Hermary-Vieille

    La conquête des îles de la terre ferme

    Alexi Jenni

    Un hiver à Madrid

    C.J. Sansom

    La couturière (Brésil)

    Francés de Pontes Peebles

    Un hiver à Madrid

    C.J. Sansom

    La disparition de Josef Mengele

    Olivier Guez

    Un testament espagnol

    Arthur Koestler

    La double vie de Jesus

    Enrique Serna

    Une dernière danse

    Victoria Hislop

    La femme qui ne vieillissait pas

    Delecourt

    Une imposture

    Juan Manuel de Prada

    La fête au bouc

    Mario Vargas Llosa

    Une offrande à la tempête

    Dolorès Redondo

    La fête au bouc

    M Vargas Llosa

    Vents contraires

    Almudena Grandes

    La fille aux neuf doigts

    Laila Fabregas

    Vents de carême

    Leonardo Padura

    La fin de l'histoire

    Luis Sepulveda

     

     

    La garçonnière

    Hélène Gremillon

     

     

    La maison des belles personnes

    Gabriel Rolon

     

     

    La maison des chagrins

    Victor del Arbol

     

     

    La nuit du décret

    Michel del castillo

     

     

    Là où se termine la terre

     

     

     

    La patience du franc tireur

    Arturo Pérez Reverte

     

     

    La peau du tambour

    A Perez Reverte

     

     

    La peau du tambour

    Arturo Perez Reverte

     

     

    La position du pion

    Rafael Reig

     

     

    La puissance des mouches

    Lydie Salveyre

     

     

    La reine aux pieds nus

     

     

     

    La reine aux pieds nus

     

     

     

    La reine du sud 

    Arturo Perez Reverte

     

     

    La reine du sud 

    Arturo Perez Reverte

     

     

    La rose de Saragosse

    Raphael Jerusalmy

     

     

    La salamandre

    JC Rufin

     

     

    La scribe

    Antonio Garrido

     

     

    La senora

    Catherine Clément

     

     

    La sombra de lo que fuimos

    Luis Sepulvera

     

     

    La table d'émeraude

    Carlo Montero

     

     

    La transparence du temps

    Leonardo Padura

     

     

    La tristesse du samouraï

    Victor del Arbol

     

     

    La valse des millions

    William Navarette

     

     

     

     

    LISTE DES LIVRES EN ESPAGNOL A EMPRUNTER EN CIRCULATION A LA TERTULIA 

    1

    Albert Espinoza

    Si tú me dices ven lo dejo todo.... pero dime ven...

    2

    Almudena Grandes

    Ines y la Alegría

    3

    Almudena Grandes

    El corazón helado

    4

    Almudena Grandes

    Castillos de cartón

    5

    Angela Becerra

    El penúltimo sueño

    6

    Antonio Skármeta

    La chica del trombón

    7

    Arturo Perez reverte

    Hombres buenos

    8

    Arturo Perez reverte

    El tango de la guadia vieja

    9

    Arturo Perez reverte

    La carta esférica

    10

    Carlos Ruiz Zafón

    La sombra del viento

    11

    Carlos Ruiz Zafón

    Marina

    12

    Clara Rojas

    Cautiva

    13

    Dolores Redondo

    Todo esto te daré

    14

    Dulce Chacón

    La voz dormida

    15

    Federico Moccia

    Perdona pero quiero casarme contigo

    16

    Gabriel García Marquez

    Cien años de soledad

    17

    Gabriel García Marquez

    La increible y triste historia de la cándida Eréndira y de su abuela desalmada

    18

    Isabel Allende

    La isla bajo el mar

    19

    Isabel Allende

    El zorro

    20

    Isabel Allende

    El reino del dragón de oro

    21

    Isabel Allende

    La ciudad d las bestias

    22

    Isabel Allende

    Los cuadernos de Maya

    23

    Isabel Allende

    Inés del alma mía

    24

    Javier Cercas

    Soldados de Salaminas

    25

    Javier Sierra

    La cena secreta

    26

    Jaume Cabré

     Viaje de invierno

    27

    Jerónimo Tristante

    El enigma de la calle Calabria

    28

    Juan Carlos Arce

    La noche desnuda

    29

    Manuel Rivas

    ¿Que me quieres, Amor ?

    30

    Maria Dueñas

    El tiempo entre costuras

    31

    Mario Mendoza

    Satanás

    32

    Mario Vargas Llosa

    La tía Julia y el escribidor

    33

    Mario Vargas Llosa

    Lituma en los Andes

    34

    Mario Vargas Llosa

    La ciudad de los perros

    35

    Victor Del Arbol

    La víspera de caso todo

     

  • Atelier lecture du 16 janvier 2020

    « Ce que je sais de Vera Candida » Véronique Ovaldé

    L’avis de Josette :

    Vera Candida, 16 ans, vit sur une île imaginaire. Elle a été élevée par sa grand-mère maternelle, sa propre mère étant déficiente mentale. Elle vient de mettre au monde une petite fille « sans père » de la même façon que sa mère et sa grand-mère avant elle et décide de quitter cette île pour élever son enfant.

    J’ai beaucoup aimé ce livre plein de vitalité, de courage, parfois de colère et enfin d’humanité. L’auteur m’a régalée par la créativité de son écriture. Où est-elle allée chercher toutes ces images étonnantes, si surprenantes, magnifiques et justes ? Quel bonheur !

    « Ordesa » Manuel Vilas

    L’avis de Jeanine :

    Le prix « Femina étranger » vient de couronner un livre vibrant et intime de Manuel Vilas. « Ordesa » (endroit très montagneux dans le nord de l’Espagne) met en valeur la sensibilité à fleur de peau de l’écrivain et poète, profondément sincère et d’une honnêteté désarmante. Un homme dans la cinquantaine, divorcé et père de deux fils, vit dans un appartement crasseux, près de l’Ebre à Saragosse. Manuel Vilas s’interroge sur la douleur humaine, le manque d’amour, le manque d’argent, le silence des êtres face aux sentiments. Il se confie un peu plus page après page , avoue qu’il a énormément bu et ne le fait plus et aussi qu’il a été un enseignant obstiné pendant plus de deux décennies. Le plus important pour lui ce sont ses parents issus de la classe moyenne inférieure, fumeurs et pauvres mais avec « style ». Le père, jusque-là passionné de voitures, se désintéresse de l’état de sa Seat Malaga quand il sent qu’il va mourir. Sa mère qui a été un ange mais qui a vu sa décrépitude et l’a repoussée.

    Il ne se remet pas de leur absence, parle de la mort, de la perte des repères liés au vieillissement, magnifie les petits riens, les gestes, les objets du quotidien et scrute le passé. Merveilleusement écrit dans une langue à la fois poétique et crue « Ordesa » se lit comme la catharsis d’un deuil impossible, celui de la mort des parents : « On est perpétuellement orphelin ». Le capitalisme ne fait pas partie de la relation parents/enfants, il n’y a pas de mercantilisme. Ce roman a été désigné meilleur livre de l’année en Espagne et l’auteur décrit comme « écrivain majeur de la littérature espagnole » dans « El Pais » et « El Mundo ».

    Antonio Munez Molina écrit : « Voici l’album , les archives, la mémoire sans mensonge ni consolation d’une vie, d’une époque, d’une famille, d’une classe sociale condamnée à tant d’efforts pour obtenir si peu. Il faut beaucoup de précision pour dire ces choses, un acide, un couteau aiguisé, une aiguille fine pour faire éclater le ballon de la vanité. Ce qui reste à la fin, c’est l’émotion propre de la vérité et la détresse devant tout ce qui a été perdu. » Et enfin pour Javier Cercas : « Un livre magnifique, courageux, bouleversant ». Manuel Vilas nous offre un récit lyrique, comique parfois, pathétique et réaliste à l’heure du franquisme déclinant. Le livre au lecteur de la concentration, tout en lâchant prise.

    L’avis de Maria :

    Manuel Vilas, écrivain et poète, est en 1962 à Barbastro (Aragon). C’est une figure d’avant-garde de la littérature espagnole. Il vit aux Etats-Unis où il enseigne l’écriture créative.

    J’ai été déçue par ce livre qui a été désigné meilleur livre de l’année par les grands quotidiens et écrivains d’Espagne. Certes l’auteur traite d’un sujet intéressant : l’impossibilité de faire le deuil de ses parents avec lesquels il n’a pas su communiquer. Il revient d’une manière simpliste, me semble-t-il, sur le quotidien, sur la vie en Espagne dans les années 60-70 en insistant régulièrement sur le couteau électrique, les cigarettes blondes, l’eau de Cologne, l’odeur d’huile d’olive… Le thème de l’incinération m’a paru intéressant et certains passages ont trouvé un écho en moi. Mais le style de l’auteur ne m’a pas permis de me laisser prendre par les sujets évoqués. Peut-être devrais-je le relire plus tard ?

    « Les dieux du tango » Carolina de Robertis

    L’avis de Marie-Lou :

    Ce roman est vraiment passionnant du début à la fin, non seulement pour l’histoire de cette femme hors du commun mais aussi parce qu’il nous entraîne dans un monde magique et pourtant …il n’y a presque que de la misère dans ce Buenos Aires du début du 20ème siècle. Par une écriture simple, très vivante (beaucoup de dialoguas) l’auteur nous entraîne dans une aventure où musique et danse, famille, misère sociale, amour et beaucoup de sensualité sont toujours là. Mais la trame de ce récit c’est le tango, omniprésent. Il est un personnage à part entière pour ces artistes qui l’ont dans la peau et ne vivent que par lui. On est immergé dans cette ville où il y avait toujours de la musique. Le cliché de Buenos Aires à cette époque (la ville aux hommes seuls, les prostituées et le tango en toile de fond) est revue et corrigé ici. Certes les hommes sont très nombreux, tous traînent un passé douloureux et la musique, l’alcool et les femmes sont leur bouée de sauvetage. Mais ils ne sont pas les seuls à souffrir : il y a aussi des femmes qui, soit dans les conventillos à élever leur marmaille, soit dans les bordels à combler et éduquer ces hommes, soit carrément dans la peau d’un mâle, sont là et bien là. En plus, à la lecture de ce roman, on s’instruit, on assiste à l’évolution du tango : d’abord chanté par des duos d’hommes, puis devenu « habanera » etc…(voir page 165). Petit à petit les tambours du début sont délaissés, arrive le bandonéon d’Allemagne, plus tard on ajoute le piano et le chant, jusqu’à former de véritables orchestres professionnels qui jouent dans les salles de bal. Alors la danse, plus la musique font que cette ville explose de sensualité malgré la rudesse de la vie.

    En résumé j’ai trouvé les personnages de ce livre très attachants, pleins de vie dans leurs malheurs et leurs bonheur. La ville de Buenos Aires avec ses différents quartiers si particuliers nous devient très familière. A lire absolument !!!!

    « Dark » Edgardo Cozarinsky

    L'avis de Jeanine :

    L’auteur, argentin, est né à Buenos Aires en 1939. En 1974, il quitte son pays pour s’installer à Paris et depuis il se partage entre ces deux pays. Cinéaste, il a mêlé documentaire et fiction. Ecrivain, il a publié des essais.

    Un vieil écrivain se souvient de sa rencontre dans les années 50, alors qu’il essaie d’échapper à sa famille bourgeoise, conservatrice, avec un homme d’âge mûr dans un bar, qui va lui faire découvrir le sexe, la politique, l’exotisme, des personnages atypiques. Les parents de Victor ne prennent pas au sérieux son désir de devenir écrivain. La rencontre avec Andrès lui permet d’être reconnu qu’individu, d’exister. Cette relation ambigüe questionne. On se laisse prendre par elle et par la découverte de la vie à Buenos Aires dans les bas quartiers où Victor va faire ses apprentissages. La fin du livre interroge. J’ai bien aimé ce roman.

    Bonjour à toutes,

    L’atelier lecture reprend son cours. Je ne serai pas avec vous mais je penserai beaucoup à cette petite équipe de lectrices assidues. J’ai beaucoup aimé me replonger dans l’atmosphère et la particularité de chaque ouvrage. « Ordesa » a suscité chez moi beaucoup de réactions, j’en parlerai la prochaine fois. Il manque mon compte-rendu sur ce beau livre « Si rude soit le début », il y sera la prochaine fois. Bonne rencontre, bons échanges et de grosses bises à toutes. Martine

     


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  • Atelier lecture du 07/11/2019

    « La fête au bouc » Mario Vargas Llosa prix Nobel de littérature 2010

    L’avis de Josette :

    Une jeune avocate new-yorkaise débarque à Saint Domingue, où elle est née, et qu’elle a quitté 35 ans plus tôt, adolescente. Elle vient retrouver son père mourant avec l’intention de lui demander des comptes sur sa collaboration zélée avec le Chef, le Généralissime, le Bienfaiteur, le Père de la Nouvelle Patrie, Son Excellence le Docteur Léonidas Trujillo de Molina qui tint son peuple sous le joug d »une dictature féroce pendant 31 ans. Elle désire connaître également le déroulement du complot fomenté par quatre jeunes héros dont le courage et l’abnégation ont abouti en 1961 à l’assassinat de Trujillo.

    Nous retrouvons , dans ce livre remarquable véritable document historique, tous les ingrédients récurrents des régimes totalitaires : sentiment de supériorité, mégalomanie, désir d’imposer ses idées et de tout contrôler, volonté de faire régner la terreur avec cruauté et cynisme sans oublier de s’enrichir au passage.

    « L’affaire Jane de Boy » Simone Gélin

    L’avis de Josette :

    L’auteur, ancienne enseignante, a déjà écrit d’autres ouvrages et reçu plusieurs récompenses. Celui-ci en fait partie.

    L’action se déroule d’octobre à décembre 1960. Un jeune couple d’origine espagnole vient de s’installer dans une maison assez isolée au bord du bassin d’Arcachon, après avoir vécu dans le quartier de la « Petite Espagne » de Bordeaux où habitent de nombreux Espagnols, réfugiés républicains. Le mari, Félix, dirige une entreprise de transports de denrées espagnoles, sise à Bordeaux. Son épouse, Justina, s’occupe de leur fille, Jane, dans leur maison. Un soir d’octobre la fillette disparaît en quelques minutes, sans aucun témoin. L’enquête, confiée au commissaire bordelais Lasserre se révèle compliquée : est-ce un crime crapuleux comme l’enlèvement au printemps dernier du petit Eric Peugeot ou bien cet enlèvement a-t-il un rapport avec l’origine espagnole des parents ? Nous suivons l’enquête au jour le jour et parallèlement nous prenons connaissance d’une lettre, véritable journal intime d’une jeune femme, ABRIL.

    J’au lu ce livre avec intérêt et plaisir. Les personnages évoluent en partie dans un Bordeaux en pleine transformation et en partie en Espagne (rappels de la guerre civile et de ses exactions). Nous baignons, en cette année 1960, dans certains événements marquants : Papon préfet de Paris, Guerre d’Algérie, Jacques Chaban -Delmas déjà maire de Bordeaux…

    « Tropique des Silences » Carla Suarez

    L’avis de Maria :

    L’auteur est née à la Havane en 1969. En 1998, elle s’installe à Rome où elle continue d’écrire et de travailler comme ingénieure et professeure d’informatique. La même année, la fondation Alejo Carpentier de la Havane lui accorde la bourse Razon de Ser pour un projet de roman. Eb 1999, elle obtient en Espagne le prix « Lengua de Trapo » pour son premier roman « Tropique des Silences » qui sera adapté au théâtre quelques années plus tard en France. En 2003 elle déménage à Parisoù elle bénéficie de plusieurs bourses d ;écriture. Actuellement, elle vit à Lisbonne où elle anime le Cub de Lecture de l’Institut Cervantes et elle est professeure d’écriture à Madrid.

    Dans ce livre, assez pessimiste, l’auteur lève petit à petit le voile sur tous les mensonges des membres de sa famille au fur et à mesure que celle-ci se déglingue à l’image de l’économie cubaine dans les années 80. La narratrice se réfugie dans le silence avec pour compagne privilégiée son chat « Frida » : « La grande qualité que nous avons en commun, c’est le silence » . Nous suivons sa fuite de la famille et du système politico-économique cubain, au travers de ses rencontres avec les jeunes, les personnes plus âgées, la consommation de drogues, d’alcools et le repli sur soi. Son refus de suivre sa mère en Argentine où vit sa famille, de suivre son meilleur ami, Quatre, en Espagne… sa vie seule dans la grande maison familiale…

    « Rien n’est noir » Claire Berest

    L’avis de Martine :

    Elle : Elle a 15 ans. Elle a été acceptée à l’école de la Preparatoria, ouverte pour la première fois à la mixité. C’est loin de chez elle, alors elle y va en tramway. Etudiante, elle aime observer l’artiste Diego Rivera peindre son premier mural. En effet, depuis que Vasconcelos est devenu ministre de l’Education Nationale, il s’est engagé entre autres, à mettre l’art sur les murs publics. La peinture est devenue monumentale, elle donne aux analphabètes le droit de lire leur Histoire Nationale, de retrouver leurs racines indiennes sublimées. Les copains de Frida se moquent d’elle, pourquoi aller le voir peindre tous les jours ? Alors Frida répond : « Un jour j’aurai un enfant avec Diego Rivera, il faut bien que je l’observe un peu avant, non ? ». Tout cela c’était avant l’Accident de tramway qui la laisse cassée de partout, avec l’abdomen traversé jusqu’au vagin par une barre de fer. Alors tout change : surtout ne pas bouger pour que son corps, devenu puzzle, se réunisse, un mois à l’hôpital, deux chez elle dans son lit à baldaquin, souffrance, douleur et son amoureux qui ne vient plus la voir. Elle remarche trois mois après son accident. Mais la rechute est dure : un an après, opération, corset de plâtre et lit à baldaquin et son « novio » qui ne veut plus d’elle. Alors le lit est décoré puis elle demande à son père des pinceaux, des couleurs, un chevalet et une toile…

    Lui : Il a passé dix ans à Paris en compagnie de la bohème européenne, de Fujita à Picasso, de bars en bistrots. Il est grand, volumineux « mi-pachyderme, mi-pieuvre aux tentacules envoûtantes » et toutes les femmes sont attirées par lui. Il peut peindre des heures d’affilée en ne buvant que du lait sans rien manger. Comme on dit, c’est une « nature » !

    Eux : « -Camarade Rivera !

    - C’est pourquoi ? Je travaille.

    - J’ai quelque chose à vous montrer.

    - J’ai pas le temps niña

    - Descends Rivera, rapido !

    Elle a apporté deux tableaux, il lui a dit qu’il viendra chez elle à Cayaocan le dimanche suivant. Et la vie ensemble commença. Un tourbillon plein de fureur, de larmes, d’alcools, de sexe, d’extravagances, de luttes, de défis, de rage, de créations, mais surtout de douleur.

    C’est une œuvre prenante, romancée, c’est sûr, mais avec, dans le style, des fulgurances littéraires. Claire Berest se coule en Frida, dans ses émotions, ses paroles, son âme, le tout avec talent. Les ultimes pages sont bouleversantes et poignantes.

    « Dark » Edgardo Cozarinsky

    L’avis de Jeanine :

    Un vieil écrivain essaye de se remémorer comment il est devenu romancier. Lui revient son adolescence à Buenos Aires dans les années cinquante, un temps où le puritanisme était la règle. Lycéen, il rêve d’échapper au milieu bourgeois et conservateur de ses parents ainsi qu’à leurs interdits. Un soir, à 15 ans, il s’aventure dans un bar où se produit une star vieillissante du tango, et y rencontre un jeune homme séduisant, Andrès. Il se présente à lui sous le prénom Victor. Une étrange relation se tisse entre eux. Victor lui parle de son désir de devenir écrivain et pour cela de ses désirs d’inconnu, de découvertes. Andrès, qui ne dévoile pas ses occupations, semble pouvoir dépenser de l’argent sans souci. Il fait découvrir au jeune Victor le monde marginal de Buenos Aires. Il lui offre des vêtements interdits dans sa famille (jeans), des spectacles, des week-ends. Ce qui n’effraye pas Victor mais renforce sa curiosité. Il espère que les portes de l’inconnu vont s’ouvrir. Andrès se joue des codes, des lois, il est à la fois tentateur et initiateur. Bien que les non-dits et les secrets les séparent, Victor est sous le charme obscur d’Andrès. (Victor est notamment initié au sexe par une cousine). Tout cela questionne bien sûr le lecteur qui peut imaginer des épilogues. Ainsi que se passera-t-il après qu’ils auront un accident de voiture ?

    Roman de formation et d’initiation, roman qui pose la question de l’origine du devenir écrivain.

    Edgardo Cozarinsky est né à Buenos Aires en 1937. Après des études de littérature, il réalise un film underground  en 1973 dont il sait que la censure l’interdira. Un plus tard les troubles politiques en Argentine le poussent à s’installer à Paris où il se consacre également au cinéma. En 1985, il retourne en Argentine où il publie un dialogue entre fiction et essai « Vaudou Urbain » qui est devenu un objet de culte. Puis viennent des recueils de nouvelles, des romans (« La fiancée d’Odessa », « le Rufian Moldave », « Loin d’où », « de l’argent pour les fantômes » etc…)

    Ses arrières grands-parents étaient des juifs partis de Kiev et d’Odessa.


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  • Atelier lecture du 29 août 2019

     

    « Le crayon du charpentier » Manuel Ribas

    L’avis de Jeanine :

    Roman dense, complexe et simple à la fois. Il se passe en Galice pendant la guerre d’Espagne, déchirement entre les républicains et les franquistes. L’auteur nous permet d’avoir une vision de chaque camp, notamment celle du docteur Dabarca, interviewé par le journaliste Carlos Da Sousa alors qu’il est mourant. Il lui raconte sa captivité mais aussi son amour pour la belle Marisa Mallo, personnage très attachant par sa personnalité et son humour. Puis vient la version du narrateur, Herbal, ancien garde franquiste. Celui-ci a tué le peintre anarchiste qui dessinait avec son crayon de charpentier « le Porche de la Gloire » de Saint Jacques de Compostelle dont il prêtait aux divinités le visage de ses compagnons de captivité. Enfin, le dernier personnage est très particulier puisqu’il s’agit du crayon qu’Herbal a ramassé et pendant tout ce récit le crayon lui parle à l’oreille et lui fera prendre certaines décisions.

    « La Reine aux Pieds Nus » Ildefonso Falcones auteur « Des Révoltés de Cordou » er de « La Cathédrale de la Mer »

    L’avis de Josette :

    Le thème :

    En 1748 débarque en Espagne Caridad, une jeune cubaine noire. Cette affranchie qui a passé sa vie dans une plantation de tabac, devenue une experte dans la fabrication des cigares, débarque seule, sans un sou dans un pays inconnu.. Melchior, doyen d’une famille de gitans, la prend sous sa protection et l’amène avec lui à Triana où il l’impose à sa famille. Peu à peu, entre sa petite fille Milagros et Caridad, s’installe une sincère affection ainsi qu’une profonde amitié. Melchior, surnommé le Galérien, vit de la contrebande du tabac et, pour cela, se déplace souvent pour des durées indéterminées. Il utilise, pour ce trafic, les talents de Caridad pour la fabrication de cigares de qualité qu’il vend à une clientèle fidèle de Séville. Au retour d’un de ces longs voyages, il apprend que le Roi a ordonné la rafle des gitans. Hommes et femmes sont séparés et déportés dans des lieux différents. Quant à Milagros, elle est à Madrid après avoir épousé le petit fils d’une ennemie jurée de Melchior. Celui-ci n’aura alors de cesse de retrouver tous ceux qui lui sont chers.

    L’avis :

    L’auteur nous plonge toujours avec réalisme au cœur de Triana : la vie ordinaire dans les différents quartiers, les amitiés et inimitiés pouvant aller jusqu’à la haine entre les différents clans, le rôle important de chef de famille à qui l’on se doit d’obéir… Avec le Galérien, nous arpentons des centaines de kilomètres, bravons de nombreux dangers à la recherche de ce trésor : le tabac. Enfin, nous vivons les sévices de la déportation, nous pénétrons dans les prisons sordides de Madrid, les bars célèbres où la belle socité madrilène vient applaudir de fières danseuses exploitées que l’on n’hésite pas à prostituer. En résumé, un très bon moment de lecture.

    L’avis de Martine :

    Auteur bien connu de l’atelier lecture par ses précédents romans, Ildefonso Falcones nous transporte cette fois-ci dans le quotidien du monde fermé, communautaire et martyrisé des gitans espagnols au 18ème siècle. En brossant la vie de Milagros, jeune, fougueuse et fière gitane amoureuse de la musique et de la danse, amoureuse aussi d’un jeune homme qui la perdra et de celle qui est sa fidèle amie, une esclave cubaine affranchie, l’auteur entraîne son lecteur dans un monde de douleurs, de tortures, mais aussi d’aventures et d’amour fou. D’autres personnages importants sont dépeints avec justesse et précision : le père et la mère, irréductible gitane, de Milagros, son grand-père, Melchior, irréductible lui aussi. Le quotidien de la vie des gitans est très bien évoqué : leur métier de forgerons, leur contrebande de tabac, leurs règles de vie, leur courage face à l’oppression, l’internement, les déplacements de population et les mauvais traitements.

    C’est un roman foisonnant à la fois par le nombre des personnages et les péripéties qui s’enchaînent. Si les règles de vie des gitans, très codifiées et imposées, ne correspondent pas du tout à ma mentalité, j’ai été particulièrement touchée par leurs dures et précaires conditions de vie. J’ai enfin trouvé que le récit était parfois un peu trop larmoyant, mais il présente à mes yeux un intérêt certain.

    « Pedro Paramo » Juan Rulfo

    L’avis de Maria :

    L’auteur est né en 1917 à Apulco (l’un des états les plus pauvres du Mexique). Il a une enfance mouvementée : son père est assassiné en 1923, sa mère meurt en 1927 et il part en orphelinat à Guadalajara. En 1935, il s’installe à Mexico où il suit des cours à l’université. En 1936, il travaille comme archiviste puis comme agent de l’immigration. Paraîtront successivement : en 1942 sa première nouvelle, en 1953 un recueil de nouvelles et en 1955 « Pedro Paramo » qui lui vaut d’être reconnu par ses pairs : d’Alejo Carpentier à Garcia Marquez. Il est aussi connu pour ses photos et ses scenaries. Il meurt en 1986.

    Juan Preciado accomplit la promesse faite à sa mère sur son lit de mort : partir à la recherche de son Pedro Panamo qui a abandonnés. Un « bourriquier » accepte de le conduire jusqu’à Comala, un village qui semble désert, en ruines et lui apprend que son père est mort depuis longtemps. S’ensuit alors, tout au long du livre, un échange avec des personnages (morts ou vivants ?), « des âmes vagabondes » qui vont lui raconter l’histoire de son père (le cacique du village).

    Il m’a été difficile de rentrer dans cette fiction où il faut oublier le « présent » pour entrer en communication avec ces « âmes vagabondes » qui nous retracent une certaine réalité mexicaine : pauvreté, tyrannie des propriétaires terriens, importance de la religion, Révolution mexicaine…

     


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  • Atelier de lecture du 20/06/2019

    Titre, chapitres, paragraphes, lignes, phrases, mots, caractères, lettres, ponctuation, 1ère et 4ème de couverture, impression, parution, traductions, auteurs, éditeurs (auteures et éditrices bien sûr), dédicaces, MAIS SURTOUT : idées, transmission, communication, intériorisation, échange, réflexion, apprentissage, découverte, évasion, imagination, ouverture, partage, plaisir, sérénité, bonheur… ALORS : contes, essais, nouvelles, BD, romans… POUR : souscrire à l’injonction de seulement 4 lettres qui forment un univers infini… DONC : LIRE !!!!!

    Jeudi 29 août nous ouvrirons une nouvelle saison de l’atelier lecture. Nous la ferons riche, d’ouvrages, d’échanges et de projets. Alors à vos pages, prêtes, lisez !

    « El beso de la muerte » Gilles Vincent

    L’avis de Jeanine : Août 1936 en Espagne, Garcia Lorca, accusé de sympathie républicaine est assassiné. Août 2011, à Marseille on découvre le corps calciné d’une femme, abandonné entre les rails. Entre ces deux morts s’écrivent les tragédies du 20ème siècle, les secrets d’état, les coulisses de la démocratie espagnole naissante et la passion dévorante d’une jeune femme pour l’ombre du poète. Entre ces deux âmes suppliciées un pacte étrange, lien au-delà du temps, va profondément bousculer la nouvelle enquête de la commissaire Aïcha Sadia… Gilles Vincent nous entraîne dans une histoire complexe sur trois époques des années 30 dans l’Espagne franquiste et sa guerre civile, aujourd’hui en France mais aussi de l’autre côté des Pyrénées où les fantômes du passé ressurgissent et tuent encore. Il entremêle ses histoires, ses personnages avec brio dans une écriture imagée. Ce polar historique est magnifiquement raconté et l’aspect politique-fiction Franco-Espagnole est un vrai régal. Ce livre a été choisi par les libraires comme « coup de cœur «  en 2013. Une histoire poussée jusqu’à la folie, émouvante, tragique, haletante et qui va diaboliquement crescendo. Gilles Vincent est né en 1958 à Issy- les- Moulineaux. Son grand-père fut député du Front Populaire ainsi que grand résistant déporté. Sa grand-mère était institutrice, hussarde de la République, bouffeuse de curés. Un père professeur en faculté, une mère professeure de lettres puis psychanalyste ont engendré un fils qui à l’âge de 20 ans s’est consacré à l’aventure des mots : ateliers, classes, conférences, romans …

     

    « La tante Julia et le scribouillard » Mario Vargas Llosa

    L’avis de Maria : Roman autobiographique : Julia Urquidi, tante de l’auteur, l’épousa en 1955 ; elle avait 29 ans et lui 19. Ils restèrent mariés jusqu’en 1964 date à laquelle Vargas Llosa l’abandonna pour s’unir à une de ses cousines germaines Patricia Llosa Urquidi. Julia Urquidi est morte en 2010. Lors d’une interview en 2003, elle dit : « C’est moi qui ait fait ce qu’il est. Le talent était de Mario, mais le sacrifice était mien. Sans mon aide il n’aurait pas été écrivain… Bon, ce fut quelque chose de mutuel, nous avions besoin l’un de l’autre. » En 1983, elle écrivit « Lo que Varguitas no dijo » en réponse au livre de l’auteur paru en 1977 à Lima. Varguitas, le héros du livre, a 18 ans. Il trompe l’ennui que génère ses études de droit en diffusant des informations dans une radio médiocre de Lima dans laquelle intervient aussi Pedro Camacho , as très écouté, du feuilleton radiophonique. Les chapitres pairs et impairs alternent entre vie amoureuse et états d’âme de l’auteur d’une part et avec la vie des personnages créés par Pedro Camacho d’autre part. J’ai été au bout du livre grâce aux histoires rocambolesques des feuilletons. Par contre le récit de la vie amoureuse de Varguitas traîne vraiment en longueur…

     

    « Héléna ou la mer en été » Julian Ayesta

    L’avis de Maria : Julian Ayesta (1919-1996) était un diplomate et fut aussi l’auteur d’un unique roman paru en 1952, considéré comme l’une des œuvres importantes de la littérature espagnole. Avec une écriture qui imite le style enfantin, l’auteur plonge dans son passé fait de journées insouciantes auprès de son oncle Arturo et de sa tante Honorina dans la ville portuaire de Gijon, avec ses cousins et cousines et plus particulièrement Héléna…qui lui fera découvrir les premiers émois de l’adolescence dans son imaginaire ? La religion est très présente dans le roman à l’image de ce qu’était la société espagnole d’après-guerre. L’auteur dans un chapitre sur « L’hiver » y développe l’idée du péché et de la tentation. L’auteur de la postface, Xavier Mauméjean, est né en 1963 à Biarritz. Il est spécialisé dans la science- fiction, le fantastique et le policier.

     

    « La transparence du temps » Leonardo Padura

    L’avis de Maria : J’ai bien aimé ce livre où Mario Condé, qui broie du noir à l’approche de ses soixante ans, nous livre ses états d’âme mais nous entraîne aussi dans une enquête sur le vol d’une statue représentant une Vierge Noire. Nous sommes ramenés des siècles en arrière et le récit très bien étayé par une excellente documentation devient passionnant au fil des pages. L’analyse sociologique faite par l’auteur à propos de la situation de Cuba et de l’état de sa société nous plonge dans une réalité assez noire.


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  • « La transparence du temps » Leonardo Padura

    L’avis de Martine :

    L’intrigue déroulée dans le roman ne m’a pas paru exceptionnelle l’ayant trouvée secondaire par rapport aux autres thèmes développés. En bref, Mario Conde, ce héros récurrent des ouvrages de l’auteur, va se lancer, pour aider un ami de lycée, à la recherche d’une Vierge Noire Médiévale qui a donc une très grande valeur.

    Ce qui m’a frappée, dans ce roman, c’est l’importance du temps (le titre d’ailleurs en témoigne), de l’introspection, de la mélancolie et de la description de la société cubaine actuelle.

    Le temps tout d’abord. Il rythme le livre par la datation de chaque chapitre qui traite de la contemporanéité des actions. Le temps historique est présent lui aussi dans les retours vers le passé intercalés parmi les autres chapitres tout au long du roman. Le temps présent égrène sa petite musique nostalgique et inquiétante dans la tête de Conde : ses 60 ans sont très très proches…Et cet anniversaire qui marque la fin du livre résonne en lui comme une échéance fatidique qui évoque son entrée dans le quatrième âge. Alors la peur s’installe : peur de la vieillesse, de la dégradation physique, peur aussi de la vie, de la société qui change autour de lui et à laquelle il ne se sent plus adapté. S’ajoute le futur départ à Miami d’un de ses meilleurs amis : y restera-t-il ou reviendra-t-il ? C’est nouveau d’avoir ce choix à Cuba : on peut voyager maintenant. Et puis, que faire à 60 ans ? Jusqu’à maintenant il lui a été dicté ce qu’il devait faire ou pas, mais maintenant la société cubaine a évolué et le grand élan collectif qui animait la jeunesse de son époque en vue d’un monde meilleur s’est mué en un individualisme forcené : chacun se débrouille pour améliorer sa vie par tous les moyens et donc certains arrivent même à se constituer de belles fortunes. Entre sa vie passée et cette vie future qu’il redoute, Conde irrémédiablement honnête et incorruptible s’interroge, éternel pessimiste désabusé. D’autre part si la société évolue vers la richesse pour certains, elle évolue aussi dans plus de misère pour d’autres. Misère que Conde découvre dans les bidonvilles qu’occupent des émigrés intérieurs venus de l’est de l’île (de Santiago notamment). Alors la mélancolie se soigne à coups de rhum avec les amis indéfectibles. La présence de sa compagne Tamara adoucit aussi ce mal être. L’intrigue policière, fort bien menée, ne sert ici que de prétexte à un roman doux amer qui transcende les époques, évoque la foi religieuse du Moyen-Age et dresse le magnifique portrait d’un honnête homme sans illusion à un tournant de sa vie. Leonardo Padura confirme une fois de plus son talent d’écrivain.

     L'avis de Françoise H :

    Leonardo Padura est un écrivain cubain, né à La Havane en 1955. Maître du polar, il a reçu le Prix National de Littérature cubain en 2012 et le prestigieux prix Princesse des Asturies en 2015.Hérétiques (Métailié, 2014)a été salué par la critique et figurait dans la première sélection du Prix Médicis étranger en 2014

    Il aurait pu choisir l'exil comme beaucoup d'intellectuels cubains. Il a choisi de rester par fidélité à ses valeurs et ne le regrette pas. Le fait de partager le quotidien de gens rend authentiques les personnages de ses fictions.

     

    Les années 90 avec la chute du mur en Europe et l'arrêt de l'aide de l'ex URSS, ont impacté durement l'économie cubaine et de fait la vie quotidienne à Cuba . Tous les produits de première nécessité étaient devenus introuvables. Même si la situation s'est améliorée plus tard, le pays est resté isolé et en précarité.

    Mario Conde, personnage emblématique des romans de Leonardo Padura, en pleine crise d'angoisse dûe à l'approche de de ses 60 ans, doit enquêter sur la disparition de la statue d'une vierge noire. Il témoigne avec amertume des fléaux de l'économie occidentale qui gangrènent l'île, de l'incursion d'une économie de marché qui entraîne l'enrichissement de certains alors que d'autres se paupérisent. Les cubains ayant de la famille à l'étranger reçoivent de l'argent pour vivre plus confortablement, des inégalités croissantes apparaissent dans la société cubaine. La Havane a vu l'arrivée des orientaux, habitants des provinces de l'est qui ont construits des bidonvilles à la périphérie, villes fantômes car niées par les autorités. Ce n'est plus une société uniforme. Il y a ceux qui ont tiré leur épingle du jeu et les grands perdants et cela rend amer l'auteur à travers son personnage.

    Comme dans hérétiques, l'oeuvre d'art disparue donne lieu à une partie consacrée à son origine et nous fait ainsi remonter le temps jusqu'au siège de St Jean d'Acre puis à la condamnation de l'ordre des templiers. Cette partie est divisée en chapitres qui s'alternent avec l'enquête de Mario Conde dans la Havane.

    Une deuxième originalité réside dans l'intemporalité du personnage Antoni barral, protecteur de la statue qui apparaît à différentes époques et finit par s 'embarquer pour Cuba pendant la guerre civile espagnole. En cela, il introduit pour la première fois le réalisme magique, cette spécialité latino-américaine que Garcia Marquez et Isabel Allende ont contribué à faire  connaître.

    Le roman se termine le jour ou Obama et Raul Castro ouvrent des discussions qui laissent espérer une normalisation des relations entre les deux pays et peut-être la fin de l'embargo. S'en sont suivis une réelle ouverture freinée bientôt par le gouvernement soucieux de ne pas aller trop vite puis l'élection de Trump . Le nouveau président veut réformer la constitution par voie de référendum, l'accès à Internet est plus facile même s'il reste cher mais les cubains dans leur sens de la débrouille y arrivent toujours.

    Nous avons hâte de retrouver Mario Conde dans une nouvelle enquête pour nous immerger à nouveau dans cette île qui  attire et fascine toujours autant.

    « Héléna ou la mer en été » Julian AYESTA

    L’avis de Janine :

    Julian Aresta est né dans les Asturies, dans la ville de Gijon en 1919. Il meurt en 1996 suite à deux cancers. Il a publié des poèmes, des nouvelles et un seul roman en 1952 : « Héléna ou la mer en été » sous l’aile du prix Nobel, le poète Vicente Aleixandre.

    Son roman est une subtile aquarelle de fraîcheur et de sensibilité. L’évolution de ce jeune homme de quinze ans qui s’engage dans la phalange, sa participation à des mouvements d’écrivains, ses divers postes de diplomates, jusqu’à son engagement contre le gouvernement franquiste sont bien décrits en postface du livre par Xavier Mauméjean, lui-même écrivain français, spécialisé dans la science-fiction, le fantastique et le roman policier et diplômé en philosophie et sciences des religions. Dans « Héléna ou la mer en été » le narrateur se tourne vers un passé, sa ville natale des Asturies où il retrouve un monde où l’insouciance s’alliait aux mystères des adultes. Toute l’Espagne renaît et avec elle l’enfance d’un homme qui n’a rien oublié des parfums de cette ancienne vie, peuplée de personnages truculents, de tantes jacasseuses, d’oncles buveurs de cidre, de cousins de Madrid et de cousines sottes à l’exception d’Héléna qui aide le narrateur enfant à métamorphoser ses angoisses dont une : la peur du péché. Tout un chapitre est peuplé de multiples questions : pourquoi Dieu a-t-il créé les étoiles, les enfants d’Adam et Eve mariés entre frères et sœurs, les mystères planétaires d’un autre monde…

    Dans ce monde se côtoient le mystère de la grâce et de la miséricorde mais aussi le désir naissant de la sensualité. Frémissement de l’air, murmures et couleurs, majesté des paysages de la côte cantabrique, beauté et délicatesse des sentiments, c’est au milieu de tout cela que l’amour descend sur un monde révolu où il suffit de prendre doucement la main de sa cousine pour mourir de plénitude.

    Les critiques ont encensé ce livre. Pr exemple El Pais : « un excellent roman d’une fraîcheur inaltérable, écrit dans une prose magistrale ».

     L'avis de Françoise H :

    A la suite des dernières rééditions, ce court roman est redécouvert et salué par la critique dans des journaux de tous bords :

    « Un des plus beaux livres de la littérature espagnole d’après-guerre. » La Vanguardia.
    « Un excellent roman, d’une fraîcheur inaltérable, écrit dans une prose magistrale ». El Paìs.
    « Tous les parfums et les sensations parallèles de l’enfance, mais aussi les vapeurs de l’éternel féminin, sont déposés avec grâce et humour dans ce roman ».Libération

    L'édition de poche a comme image de couverture un magnifique tableau de Joaquín Sorolla peintre majeur espagnol du X X ème siècle, c'est une illustration parfaite pour ce roman.

    L'auteur se remet à la place de l'enfant qu'il était et imite pour cela un style enfantin en utilisant des des fantaisies typographiques comme celles de supprimer des espaces entre les mots ..
    Il peint par petites touches ses souvenirs d'enfance heureuse et plus particulièrement les étés passés au bord de la mer :

     

    les batailles de polochons entre cousins et cousines qui rendaient folle la tante chargée de les garder.

     

    les baignades propices à taquiner les femmes de la famille engoncées dans des tenues de bain désuètes et improbables.

     

    l'éveil à la sexualité et l'attirance vers sa cousine Helena (l'unique cousine à ne pas être sotte..., jugement misogyne des garçons adolescents de la famille)

     

    la place de la religion qui rythme le temps dans la société espagnole de cette époque, l'interprétation qu'avaient les enfants des péchés et comment ils s'en accommodaient alors qu'ils étaient éduqués chez les jésuites avec pour chacun un père spirituel....

     Juliàn Ayesta, c'est la postface qui nous en parle.  Elle occupe une part très importante dans ce livre. Elle nous éclaire sur l'auteur et revient sur la période évoquée.
    Elle est l'oeuvre de l'écrivain français  Xavier Maumejean érudit et touche à à tout, qui s'implique particulièrement ici puisque ses deux familles ont participé au conflit dans les deux camps.

    Julián Ayesta est né en 1919. Il était très jeune pendant la guerre civile, après des études de droit, il entra dans la diplomatie en 1947, mais ses liens avec certains dissidents l’écartèrent des postes clés. Il publia des poèmes, des nouvelles et un seul roman, en 1952, sous l’aile du prix Nobel Vicente Aleixandre. Il est décédé en 1996.

    « La maison des belles personnes » Gabriel Rolon

    L’avis de Marie-Lou :

    C’est une histoire tout à fait originale car, à la place de policiers, ce sont des psychiatres et autres psychologues qui mènent l’enquête à propos d’un crime !!! Il est vrai que nous sommes à Buenos Aires, ville où il y a le plus grand nombre de psy au m². C’est bien écrit, facile et agréable à lire (beaucoup de dialogues). L’auteur nous présente les personnages de façon un peu ambigüe ce qui fait que le lecteur a du mal à savoir de quels côtés ils se trouvent vraiment : amis ? ou ennemis ? On peut tous les croire impliqués dans cette drôle d’histoire, tous ont de bonnes raisons d’être plus ou moins complices de ce drame. Tout se dénoue à la fin, dans les dernières pages du livre. Pablo, le héros du roman, n’a qu’un but : la recherche de la vérité. Finira-t-il en justicier irréprochable ou en homme finalement raisonnable même au prix d’un mensonge qui soulage tout le monde ?

    « L'oubli que nous serons »d' Héctor Abad Faciolince, journaliste, romancier et traducteur de nombreux auteurs italiens.

    Avis de Françoise H :

    C'est en lisant le lambeau de Philippe Lançon que j'ai eu envie de mieux connaître l'écrivain colombien Héctor Abad et de lire son livre « L'oubli que nous serons ». En effet, Philippe Lançon, journaliste rescapé de l'attentat de Charlie Hebdo cite les lectures qui l'ont marqué pendant sa longue hospitalisation.

    Cet ouvrage est une déclaration d'amour filial et absolu à un père assassiné vingt ans auparavant par des « sicarios » à la solde de politiciens d'extrême droite.

    L'auteur de « L'oubli que nous serons » fait référence dans ce titre à un poème de Borges retrouvé sur le corps de son père et en écrivant cet hommage, il contribue à faire vivre un peu plus longtemps sa mémoire , à le faire mieux connaître et à effectuer pour lui-même une sorte de thérapie.

    Héctor Abad est le seul garçon d'une famille de six enfants. Il a occupé une place privilégié auprès de son père qui l'adorait et lui laissait absolument toute liberté.

    Héctor Abad père (en espagne comme en Amérique latine, il est de tradition de donner le prénom du père au premier garçon) était un humaniste. Médecin, professeur d'épidémiologie à l'université de Medellin, il a toujours oeuvré pour le bien-être des populations pauvres. Courageux, il n'hésitait pas à dénoncer les injustices et les scandales de dirigeants ultra conservateurs. Menacé à cause de ses prises de position et ses discours, très souvent en danger de mort, il a dû s'exiler plusieurs fois.

    Ce livre est captivant car il nous raconte à la fois l'histoire d'un pays livré à la violence dans les années 80, l'histoire d'une famille et surtout la vie d'un homme d'exception.

     


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  • Atelier de lecture du 14 février 2019

     

    « Point Cardinal » Leonor de Recondo

    L’avis de Maria :

    L’auteur décrit le cheminement de Laurent qui devient Mathilda puis Lauren, remettant en cause sa vie de famille auprès de sa femme Solange et de ses deux enfants Claire et Thomas. J’ai trouvé que l’auteure a développé les interrogations de Laurent sur son désir de devenir femme mais a peut-être minimisé l’impact de cette décision sur les membres de sa famille qui acceptent assez rapidement cette situation. Seule, la réaction de son fils paraît plus proche de la réalité sociale actuelle même si sur ce sujet notamment tout est en train d’évoluer doucement.

    « La barraca » Vicente Blasco Ibanñez .

    L’avis de Françoise H. :

    L'auteur, écrivain, journaliste et homme politique espagnol est né à Valencia en 1867. Souvent comparé à Zola, il a été poursuivi et emprisonné pour ses engagements, il est mort en en exil à Menton en France en 1928.

    Ce roman écrit en a été traduit en Français sous le titre de «Terres maudites ». Il a été écrit en partie alors que Blasco Ibañez se cachait de la police dans une ces fermettes appelées « barracas »

    Il décrit la vie rude des femmes et les hommes de la « Huerta » : plaine s'étendant de part et d'autre du fleuve Turia,  une terre fertile mais écrasée de soleil  où la gestion de l’eau est un enjeu central qui a donné naissance à des rites et à un tribunal particulier avec ses lois, ses règles et ses sanctions. C'est à une de ses séances qui se déroulent tous les jeudis à midi devant une église de Valence que nous assisterons pendant notre prochain voyage.

    L'histoire s'attache particulièrement au destin tragique de deux familles se succédant à dix ans d'intervalle sur la même propriété.  On ne peut s'empêcher de souffrir tout au long de lecture de la fin inéluctable qui attend les personnages auxquels on s'est attaché.

     Lire un extrait du roman : http://liseuse.harmattan.fr/2-7475-6354-5



    « Le labyrinthe des esprits » Carlos Ruiz Zafon

    L’avis de Martine :

    Dernier livre de la saga du « Cimetière des livres oubliés » et pour moi le meilleur. Si on a aimé Alexandre Dumas, Eugène Sue…on ne peut pas passer à côté de ce roman d’aventures aux nombreux personnages tous très typés, aux rebondissements multiples et à l’héroïne inoubliable : Alicia Gris. Parlons d’elle : pour moi elle évoque la femme fatale des films en noir et blanc des années 1950 : impassible, provocante, sulfureuse, mystérieuse, amorale, intelligente, téméraire, solitaire, tortueuse et torturée. Le second personnage, pour moi, c’est l’irrésistible Fermin au gros nez : sentencieux, exotique, truculent, gourmand, fortement sexué, droit, fidèle, courageux et à la verve soutenue et intarissable. Et puis viennent les autres : les bons, les méchants et parmi eux les vaincus et les vainqueurs.

    Le cadre: la Barcelone franquiste. L’intrigue : la recherche de la vérité sur la famille de libraires Sempere. L’enquête : c’est Alicia Gris qui la mène. Le début : la disparition d’un ministre franquiste qui déchaîne une cascade d’assassinats, de représailles et de mystères. Et l’on se retrouve embarqué dans une œuvre absolument magistrale, que l’on pourrait qualifier de gothique par l’architecture flamboyante du récit qui même érudition, suspens, aventures, poésie. Ce livre qui est un magnifique hommage à la littérature procure un véritable plaisir de lecture !!!



    « Par-delà la pluie » Victor del Arbol

    L’avis de Maria :

    Rien ne laisse penser dans le parcours de Miguel (75 ans) et celui d’Héléna (70 ans) le lien d’amitié et plus qui va se tisser entre eux dans la maison de retraite de Tarifa. Suite au décès tragique d’un de leurs compagnons auquel ils étaient attachés, ils décident de partir sur les routes (Barcelone, Madrid, Malmö…) en quête de leur passé mais aussi pour se confronter à la réalité de leur vie : vieillesse, maladie, famille, intimité… Je suis toujours séduite par les livres de Victor del Arbol qui réussit à nous tenir en haleine jusqu’au bout en faisant des liens inattendus qui ramènent à la guerre d’Espagne, aux prisons franquistes, à la corruption des policiers mais aussi à la vie des deux personnages du livre.

    L’avis de Jeanine :

    Miguel et Héléna se rencontrent dans une résidence pour seniors à Tarifa. Ils décident de s’épauler et prennent la route au volant d’une flamboyante Datsun direction Madrid, Barcelone et Malmö. On va suivre leur cheminement psychologique. L’auteur explore les racines de leur souffrance pour qu’ils puissent aller de l’avant. Pendant ce temps, à Malmö (Suède) Yasmina, fille d’immigrants marocains, vit sous la coupe d’un grand-père autoritaire (Abdul) et est méprisée par sa mère Fatima qui la considère comme une « honte » parce qu’elle travaille pour un Suédois au passé trouble et vit une romance passagère avec le chef adjoint de la police suédoise. Fidèle à ses qualités de sondeur d’âmes, l’auteur analyse leur part d’ombre, voire de noirceur comme celles pleines d’humanité. Il excelle à décortiquer les personnalités de ses personnages souvent écorchés, en suivant une trame d’aller-retours dans le passé qui peut dérouter au début tout en s’acheminant et en construisant son intrigue habilement vers un dénouement, dans le patient dévoilement de l’intime criant de vérité et d’émotion. L’auteur se sert des codes du polar avec une écriture raffinée, empreinte de poésie, de vérité et d’émotion qui m’a convaincue quant à moi de son talent.



    « La nuit du décret » Michel del Castillo

    L’avis de Josette :

    L’auteur est né à Madrid en 1933 de père français et de mère espagnole.

    Le thème : L’action se déroule en 1975. Le jeune inspecteur Loredo opérant dans la région de Murcia vient de se voir affecter à Huesca, petite ville du nord de l’Espagne, sous l’autorité du commissaire Avelino Pared. Celui-ci semble avoir laissé un triste souvenir en Catalogne, lors de la répression sanglante qu’il aurait conduite pendant la guerre civile. Avant de regagner son poste Loredo mène l’enquête au sujet de son supérieur afin de mieux cerner cet homme énigmatique.

    L’avis : roman très intéressant qui, sur fond de guerre civile, analyse le comportement des deux personnages principaux, d’autant que ce livre a été écrit peu après la mort de Franco. Il a été couronné par le prix Renaudot en 1981.



    « La rose de Saragosse » Raphaël Jerusalmy

    L’avis de Maria :

    Ecrivain français né le 2/11/1954, l’auteur situe le livre durant l’Inquisition en 1485. Torquemada fait régner la terreur après le meurtre de l’évêque de la ville. Le refus de la soumission se révèle au travers de gravures satyriques sur les murs de Saragosse. Au travers de la résistance de deux familles juives récemment converties et plus particulièrement poursuivies par Torquemada, l’auteur fait apparaître la délicatesse, l’amour de l’art, la création artistique. Même Angel, noble déchu, misérable à la solde de Torquemada, montre de la créativité et une certaine sensibilité. Au milieu de la noirceur de l’époque, la sensibilité de Léa, de sa famille, de leurs amis permet de lire ce livre avec plaisir.

     


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  • Atelier de lecture du 17/01/2019

     

    « L’heure de nous réveiller ensemble » Kirmen Uribe

    L’avis de Marie-Lou :

    Dans ce roman historique (tous les événements relatés ont bien eu lieu) l’auteur prend tout son temps, à travers l’épopée d’une famille militante basque antifranquiste, pour arriver à la fin du livre à l’inévitable : la création de l’ETA. Jusqu’à présent, pour moi et pour la majorité des gens ETA est synonyme de bombes, d’attentats… Pourquoi ne reste-t-il que cette image particulièrement négative d’un mouvement qu’un groupe de jeunes issu du PNB fondirent en décembre 1958 pour lutter contre la politique répressive du régime de Franco. Ils estimèrent avoir assez attendu l’aide étrangère promise afin de renverser le tyran ! En août 1946, les Anglais disent : « Ce que j’ai vu ces jours-ci est extraordinaire. Les Basques disposent d’une structure paramilitaire remarquable. Si une telle organisation s’étendait à toute l’Espagne, Franco ne resterait pas un jour de plus au pouvoir ! ». Les vaincus de la guerre civile soit se sont exilés ou bien ont tourné la page, soit ont courbé l’échine et vécu 40 ans de dictature. Les seuls Espagnols à ne pas renoncer, à continuer la lutte sont las Basques (et aussi les Catalans).

    Fin du conflit mondial en 1945… Le temps passe et les Espagnols attendent toujours l’aide extérieure promise. Le nouveau président des Etats-Unis, Truman (qui succède à Roosevelt) est un anticommuniste pur et dur. Il entraîne les alliés et toute l’Europe à ses idées : c’est le début de la guerre froide. Leur souci n’est plus Franco et l’Espagne, ce dernier se sent donc tranquille pour continuer sa répression. Mais il y en a qui ne baissent pas les bras restant fidèles à leur idéal, même s’ils doivent agir seuls : Franco doit tomber ! C’est une mécanique infernale qui s’enclenche, une politique de plus en plus répressive à l’encontre des opposants et particulièrement des Basques, entraînant forcément plus d’opposition et de radicalisation en face. Donc, en décembre 1958, ETA voit le jour…

    Conclusion : Ce livre est une page (grosse page très bien documentée : bravo à l’auteur et à ses recherches) méconnue de l’histoire de l’Espagne à l’époque franquiste (avant et après la guerre). A lire absolument même s’il y a parfois des passages un peu technique (histoires d’espions et de services secrets…) mais il ne faut pas décrocher car plus on avance dans la lecture, plus ce livre nous enrichit !

     

    « Monteperdido »  de  Agustín Martinez -  genre : Polar

    L’avis de Françoise H. :

    Monteperdido est un village du haut Aragon dans les Pyrénées espagnoles près du mont du même nom et de la frontière française.
    Ce village isolé est  le théâtre d'une enquête policière menée par deux policiers nationaux venus de Madrid afin de rouvrir le dossier clos et bâclé par la garde civile locale cinq ans auparavant concernant la disparition de deux fillettes âgées de onze ans.

    L'histoire commence avec la réapparition de l'une d'entre elles et le compte à rebours angoissant pour retrouver la deuxième.
    L'auteur Agustín  Martínez décrit la vie de ce village refermé sur lui-même et sur ses secrets. Ce polar  sociologique dont l'ambiance est extrêmement prenante   n'est pas sans rappeler ceux de Dolores Redondo quand elle dévoile une région à travers ses coutumes et ses croyances.  Autre point commun, la principale  enquêtrice est une jeune femme.
    La description des lieux ainsi que des mentalités  semble très juste.  On s’y sent en complète immersion et on s’y reconnait surtout  lorsqu’on a eu l’occasion de séjourner très souvent dans la région.



    « Le monarque des ombres » Javier Cercas

    L’avis de Martine :

    Manuel Mena est le grand-oncle de Javier Cercas. Il s’est engagé du mauvais côté (celui des nationalistes) et a trouvé la mort à l’âge de 19 ans lors de la bataille de l’Ebre. Alors que faire de ce disparu qui jette encore, 80 après, une ombre sur la famille Cercas, et dont l’auteur socialiste se demande longtemps qu’en faire : l’éclairer ou la laisser disparaître à jamais. Qu’est-ce qu’un personnage, à la si courte vie semblable à tant d’autres, possède de si particulier pour devenir le centre d’un livre écrit par un auteur reconnu ? Rien, si ce n’est le talent de l’auteur qui part à travers ce personnage, à la recherche de sa propre histoire dans une quête et aussi enquête qui l’emmène dans le village natal familial d’Ibahernando (Estremadura) à la recherche des derniers survivants de la guerre. L’auteur fait intervenir dans le roman son ami cinéaste David Trueba qui a lui aussi son avis sur la question, exprime ses doutes, sa gêne quant au bienfondé de son enquête, évoque sa famille, la maison du village qu’il faudra bien vendre un jour, revient sur les causes de la guerre civile, évoque les grandes batailles de celle-ci, analyse la seconde République… Le tout aboutit à un livre très habilement écrit, mêlant des chapitres où l’auteur s’évoque tantôt à la troisième personne, tantôt à la première et qui sous une écriture facile se révèle très particulier et brillant.


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  • Ateliers de lecture du 22/11 et du 20/12 2018

     

    Humble rapporteuse des avis éclairés de mes compagnes de lecture toujours à l’affût de la dernière parution, du nouvel auteur, des meilleures critiques, je leur à souhaite à toutes une excellente année 2019, littéraire, romanesque, policière, actuelle, historique, politique, poétique, autant d’adjectifs qui balaient les types d’ouvrages que nous parcourons. Que cette année nous amène à tourner beaucoup de pages qui nous entraîneront dans ces échanges féconds et amicaux que nous aimons tant partager.

    Martine

    « Le reste est silence » Carla Guelfenbein

    L’avis de Maria :

    L’auteure est née en 1959 à Santiago du Chili. Exilée à onze ans en Grande-Bretagne pendant la dictature, elle vit au chili et travaille dans une agence de publicité. Elle a écrit : « L’envers de l’âme » en 2001, « Ma femme de ta vie » en 2007 (ces deux romans ont été qualifiés de best-sellers), « Nager nues » en 2013, « Etre à distance » en 2017.

    « Parfois les mots sont comme des flèches, ils vont et viennent, blessent et tuent comme à la guerre. Voilà pourquoi j’aime bien enregistrer les adultes » dit Tommy un garçon de 12 ans, malade (problèmes cardiaques) qui se promène avec le MP3 offert par sa belle-mère, Alma. Il saisit et enregistre donc les conversations des adultes. C’est ainsi qu’il apprend que sa mère n’est pas morte de maladie, mais s’est suicidée. Il essaie alors de trouver des éléments qui constituent son passé. Trois personnages s’expriment tour à tour dans le roman : Juan, le père de Tommy chirurgien cardiologue, Alma la belle-mère de Tommy et la maman de Lola âgée de 8 ans, Tommy lui-même. Chacun dévoile ses sentiments profonds, ses peurs, mais passe toujours à côté de l’autre sans arriver à le comprendre. On pénètre dans la vie intime des personnages, dans leurs secrets familiaux et l’on voit peu à peu partir à la dérive cette famille jusqu’au drame final.

     

    « Au cinq rue Lima » Mario Vargas Llosa

    Ce prix Nobel de littérature en 2010 est au Pérou en 1936. Il a écrit une vingtaine de romans.

    Cet ouvrage, écrit en 2016, dépeint, sur fond de dictature sous la présidence d’Alberto Fujimori, un gigantesque scandale à la fois politique, médiatique et sexuel sous la forme d’une intrigue policière à tiroirs dans un contexte érotico-sexuel assez débridé. L’intérêt de ce roman devient plus évident dès qu’apparaissent les vraies personnalités des différents personnages : politiciens, policiers de l’époque : le Président, le Docteur (Vladimiro Montesino, avocat des narcotrafiquants, chef des services de renseignements), d’autant plus que l’on sait que l’auteur avait été candidat à la présidence de la République en même temps que Fujimori. Donc à lire avec ces informations en tête.

     

    « La Maison des Belles Personnes » Gabriel Rolon

    L’avis de Martine :

    L’auteur est né à Buenos Aires en 1961. Il exerce dans cette ville comme psychanalyste. C’est une figure médiatique en Argentine où il a présenté plusieurs programmes de radio et de télévision autour de la psychanalyse pour des médias nationaux. Ce livre est son premier roman.

    Voici un roman policier original qui déroule une enquête sur fond de psychanalyse, ce qui m’a d’ailleurs entraînée dans une lecture instructive qui garde toutefois les codes du polar. L’atmosphère est sombre, inquiétante et l’ouvrage somme toute addictif. Le roman commence ainsi : un soir, un célèbre psychanalyste est contacté par une belle jeune femme qui lui adresse une demande surprenante : celle de l’aider à déclarer son jeune frère, accusé du meurtre de leur père, irresponsable mentalement. Et c’est ainsi que l’on pénètre au sein d’une famille pour le moins particulière : la mère, beaucoup trop amoureuse de son époux, est morte, le père, abject, a été assassiné par son fils psychotique, la sœur aînée se montre très protectrice, la jeune sœur, dotée d’une intelligence supérieure, est un prodige du violon. Alors la question essentielle du livre est : où est la vérité ? Faut-il se fier aux apparences ? Qui est vraiment coupable ? Le psychanalyste Pablo Rouvier nous entraîne dans une enquête angoissante et nous fait pénétrer dans un monde de noirceur tout en dépeignant une Argentine corrompue. Cet enquêteur offre au lecteur une personnalité humaine, compatissante mais aussi entêtée. Sa réussite professionnelle ne l’empêche pas d’avoir ses propres fragilités et une grande sensibilité. En ce qui me concerne, les remarques d’ordre psychanalytiques ne m’ont pas gênée. Au contraire, outre leur intérêt, elles contribuent à l’originalité de ce roman habilement construit.

     

    « Eva » Arturo Perez Reverte

    L’avis de Marie-Lou :

    Falco, c’est le James Bond de la guerre d’Espagne ! Sympa, charmeur, toujours intéressé par une aventure amoureuse. Ancien trafiquant d’armes, le voilà maintenant espion pour la cause franquiste, au service del « Almirante » personnage très pittoresque, au langage particulièrement fleuri. Cette fois, il s’agit pour Falco de récupérer pour les agents de Franco, l’or de la République Espagnole qui se trouve sur un bateau qui doit quitter les eaux neutres de Tanger pour la Russie avec son précieux chargement. Le frère de Franco est lui-même le commanditaire de cette opération. Avec toujours en toile de fond des faits historiques réels et des personnages ayant réellement existé, l’auteur nous entraîne, encore une fois, dans une belle aventure ! Mais rassurez-vous, notre héros est invincible, même dans les situations impossibles il s’en sort toujours ! Il doit continuer à vivre pour de nouvelles aventures…

     

    « L’heure de nous réveiller ensemble » Kirmen Uribe

    L’avis de Jeanine :

    Né en 1970, Kirmen Uribe est l’auteur le plus prometteur de la nouvelle génération basque. Son recueil « Entre temps donne-moi la main » a reçu des prix prestigieux et son roman « Bilbao-New-York-Bilbao » a obtenu le prix national de littérature espagnole. C’est un romancier et poète natif d’Ondarroa, issu d’une famille de pêcheurs. « L’heure de nous réveiller ensemble » raconte l’histoire d’un peuple, à travers notamment celle d’un couple, Karmele et Txomin, lui plus âgé qu’elle de quinze ans. Au sortir de la guerre civile, achevée pour l’un et pour l’autre dans le camp des vaincus, ils se rencontrent en France étant membres tous les deux du collectif artistique « Eresoinku » qui soutenait la cause du gouvernement basque en exil et financé par Manu Sota fils ainé de l’une des familles les plus riches d’Europe à l’époque. Txomin était trompettiste et Karmele danseuse. Lorsque la France en 1940 ne leur sera plus un refuge, ils s’exilent au Venezuela où Txomin devient membre des services secrets basques. Plus tard, ils devront revenir en Espagne avec leurs enfants pour une nouvelle mission à Barcelone. Txomin sera arrêté, torturé et emprisonné et ne s’en remettra jamais. Il y a aussi Antonio José Aguirre qui est à la tête de ces résistants basques et va rejoindre Manu Sota à New York où ce dernier est parti en août 1938 pour y ouvrir une délégation du pays basque. Aguirre, en qualité de professeur d’histoire à l’université Columbia, parle du rôle important que les Basques peuvent jouer à travers les services secrets basques, notamment sur les franquistes et dans la deuxième guerre mondiale. L’ambassadeur britannique à Paris, le député Noël Baker dira : « Les basques disposent d’une structure paramilitaire remarquable. Si une telle organisation s’étendait à toute l’Espagne, Franco ne resterait pas un jour de plus au pouvoir. » Une fois la guerre finie, l’ONU condamne Franco mais aucun pays ne suit et en 1947 les USA rejettent la condamnation de Franco par les Nations Unies. Manu Sota et Aguirre, pour maintenir éveillée la cause basque, organisent un congrès mondial à Paris sur la culture basque. En décembre 1958 des jeunes issus du PNB fondent l’ETA et sa revue. Y participent les enfants de Txomin et Karmele. Mais toute la direction de l’ETA fut démantelée le 3 décembre 1970 : « procès de Burgos ». Des protestations s’élevèrent enfin dans toute l’Europe, notamment massives en France.

    Bien qu’ayant un champ romanesque, ce livre parle de personnages réels, d’un peuple dans le siècle qui fut pour lui celui de toutes les déchirures. Il se base sur un travail de recherches remarquables, ce qui peut lui donner parfois un air de documentaire, notamment par rapport à la saga qu’est « Patria ».

     

    « Patria » Fernando Aramburu

    L’avis de Martine :

    Dès les premières pages j’ai été happée, je suis entée dans l’histoire et j’ai juste eu envie de poursuivre ma lecture rédigée dans un style simple, direct adapté au milieu social des personnages et ponctuée de dialogues qui rendent l’ouvrage vivant. Les époques se mélangent au sein de chapitres courts et rythmés. Au début de chacun d’eux on ne sait si l’on repart dans le passé ou si l’on reste dans l’actualité des personnages. Ce roman, c’est un puzzle qui se met en place progressivement. Chaque protagoniste est typé, on a donc ainsi une idée très claire de chacun d’eux, de sa psychologie, de ses sentiments. Les histoires de la vie de tous les jours se télescopent avec l’histoire de la province avec un grand H. Au départ, deux couples vivent dans un village du pays basque. L’un, qui a trois enfants, évolue dans un milieu ouvrier et l’autre, un peu plus aisé a deux enfants. Les deux couples partagent une vraie amitié, les hommes sont fous de vélo et vont au café ensemble, les femmes savent se faire plaisir en dégustant chocolat et churros à Donostia toutes les semaines. Tout va déraper et basculer quand s’instille progressivement le poison de la lutte armée pour l’indépendance car au sein des villages l’idéologie, peu intellectualisée, de l’indépendantisme ne laisse que deux choix : collaborer ou être ostracisé. Dans l’une des familles l'un des fils rejoint la bande armée séparatiste; l'autre devient l’objet de la vindicte du groupe armé quand le père de famille, El Txato, un petit patron, rechigne à payer "l'impôt révolutionnaire". Peu à peu mis à l'index par son entourage, il finit …..Les deux héroïnes, rudes, à la forte personnalité inflexible, ne m’ont pas été très sympathiques, leurs maris, plus humains, beaucoup plus. Le roman a quelques longueurs quand il s’appesantit sur la vie sans grand intérêt de certains enfants des personnages principaux et sur la fin, il s’étire. Une seule belle personne éclaire cet ouvrage : c’est Arantxa, la sœur du militant pur et dur. C’est la seule qui sait faire la part des choses, qui sait dissocier les jugements des sentiments (les uns n’empêchent pas les autres) et qui a une vue lucide sur les drames qui frappent les deux familles et plus largement sur l’ETA. A noter que le succès du roman a été tel qu’une adaptation en série est en cours en Espagne et qu’il est un excellent sujet de débat. Et pour terminer voici ce que dit l’auteur de l’idéologie décrite dans le livre : « Je ne sais pas si cette idéologie a été totalitaire, mais ceux qui se sont efforcés de la mettre en œuvre, oui, sans aucun doute. Ils ont voulu créer, de force, une communauté idéale. Estimant que certains citoyens y faisaient obstacle, ils ont fait d'eux des ennemis. Ils ont nié leur humanité. Après les avoir 'chosifiés', ils se sont arrangés pour les supprimer du paysage rêvé. Il y a eu plusieurs degrés dans cette exclusion : le silence, la soumission ont été les plus légères. Ensuite, l'exil. L'expulsion extrême a été l'assassinat sélectif. ETA a été créé pour accomplir cette tâche spécifique.  » (17/03/2018)magazine « L’express »

     

    « Point cardinal » Leonor de Recondo

    L’avis de Martine :

    Voici un livre court (143 pages) où pourtant tout est dit. Un couple s’aime depuis le lycée. Ils se sont mariés, ont eu deux enfants Thomas et Claire, jusque-là rien de très original. Un indice : Laurent, le père, éprouve depuis l’enfance une attirance particulière pour les vêtements de sa mère, il aime leur velouté, leur douceur et il adore s’enfermer dans l’armoire pour les toucher le plus longtemps possible. Et le livre commence ainsi, comme une scène de film : un parking quasiment désert où dans une voiture une femme se démaquille, enlève sa perruque blonde, sa robe et finit par se dénuder complètement pour se vêtir ensuite de vêtements masculins. C’est Laurent, le mari, le père. Ce roman est le parcours de cet homme aimant qui se sent femme, qui sait qu’il ne vit pas dans le bon corps et qui va vouloir affirmer, courageusement, cette identité féminine aux yeux de tous, famille et collègues de travail compris en se pliant à toutes les opérations nécessaires à sa transformation. Cette identité, en s’affirmant, va provoquer un cataclysme dans la famille… C’est un roman magnifique, très nuancé, où tout est dit finement, sans superflu et sans pathos mais avec beaucoup de sentiments. Le thème c’est l’identité, un point c’est tout. Il n’est nullement question d’homosexualité ni de désir sexuel.


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  • Atelier lecture du 18 octobre 2018

     

    « La conquête des îles de la Terre ferme » Alexis Jenni

    L’avis de Marie-Lou :

    J’ai trouvé ce livre très intéressant pour deux raisons essentielles :

     

    Il est écrit dans un style très simple, familier même dans les dialogues, rendant le livre facile et agréable à lire.

     

    Il détaille parfaitement toute cette nouveauté que découvrent les Espagnols par la description des paysages, des indigènes, de toute cette nouvelle vie. L’auteur nous emmène vraiment dans un autre univers, le Nouveau Monde !

    Le narrateur de cette épopée, Jean de la Luna, est un ancien moine-confesseur arrivé au couvent à cause d’un père, noble ruiné propriétaire terrien dans la plaine d’Extremadure, qui ne sait que faire de cet unique rejeton qu’il n’aime pas. Par hasard, il va à Séville et il embarque pour le Nouveau Monde en devenant le secrétaire-notaire d’Hernan Cortès ! Ce livre est une sorte de «  journal » qu’écrit Juan, surnommé Innocent par son maître Cortès. Il nous conte très en détail, étape après étape, le démantèlement et la chute de l’empire aztèque (les Mexicas), la fin puis la mort du roi Montezuma. (page 347).

    Lors de l’expédition qui se solde par une honteuse retraite de l’armée espagnole lors de la « Noche Triste », juillet 1520, l’armée de Cortès compte 553 soldats, 110 marins, 16 chevaux et des chiens. Cortès, très malin, profita alors des divisions indigènes et de leurs haines intestines et parvient à s’allier aux Totomaques et aux Tlaxcalans. A la deuxième expédition (août 1521) pendant laquelle Cortès en réchappe de justesse « il est blessé et s’enfuit comme un chien mouillé ». Ce n’est que grâce aux indigènes rebelles aux Mexicas et surtout grâce à la prise du nouvel empereur mexica que le massacre cesse…

    « Nous semions la terreur et nos alliés y cédaient avec enthousiasme… » (page251)

    « En plus des Indiens que nous avons déjà, un autre millier se joignait à nous, de bon cœur, semblait-il… » (page 244)

    « Heureusement qu’ils se détestent tous. Il leur suffirait de s’entendre pour nous submerger… » (page260)

    Cortès vainqueur s’installe dans un palais à Coyoacan, le roi d’Espagne lui accorde le statut de Marquis del Valle. Puis il est repris par la fièvre de l’or et des conquêtes et part avec une armée considérable à la recherche du Honduras. « Ils partent pour rien » pour plusieurs mois et « reviennent ceux qui ne sont pas morts des fièvres et des flèches jaillies de la forêt ». Ils retournent à Cuba : « la vie ne peut pas continuer ainsi » se plaint Cortès, « mais il a changé, il a perdu le charme et la chance, il a perdu ce avec quoi il entraînait les hommes et surmontait les obstacles. On joue, on gagne et puis on perd. Il a brûlé sa chance et son charme dans notre affreuse aventure. »

    On comptait 80 millions d’Indiens à la fin du 15ème siècle. Il en reste moins de 10 millions un siècle après.

     

    « Patría » Fernando Arramburu

    L’avis de Françoise H. :

    Pátria est le 9ème roman de l'auteur basque Fernando Aramburu qui a également écrit des nouvelles, des recueils de poésie et des livres pour enfants.

     Paru en 2016 en Espagne, Pátria (vendu à plus de 500 000 exemplaires) a reçu le Prix national de littérature narrative en octobre 2017.

    Il s'agit d'une saga passionnante de plus de 600 pages qui met en scène deux familles amies par le passé mais séparées par le conflit armé d'ETA, une fiction qui ne saurait, par le biais de ce roman, expliquer seule le conflit qui déchira toute une région mais elle y contribue.

    Dans ce roman, les personnages femmes représentent les piliers de leur famille.

    Le fils de l'une s'est engagé dans l'action violente et purge une longue peine de prison. Quant à l'autre femme, Bitori, la femme de Tchato assassiné pour avoir refusé de verser l'impôt à la lutte armée, elle décide de retourner chez elle en bravant les anciens bourreaux ou leurs complices.

    Par cette fresque romanesque, F Arramburu nous éclaire sur les mécanismes du terrorisme et délivre un message universel.

     

    « La rose de Saragosse » Raphaël Jerusalmy

     L’avis de Martine :

    Nous sommes en 1485 à Saragosse. Le père inquisiteur de la ville, Pedro de Arbuès, est assassiné. On soupçonne les grandes familles de la cité qui voient d’un mauvais œil le pouvoir grandissant du Saint Office. Dans les palais de la Juiverie promis au saccage, l’inquiétude monte. Alors dans la ville fleurissent sur les murs des placards, signés d’une rose épineuse, et représentant le cadavre écorché d’Arbuès. Scandalisé, Torquemada le nouvel inquisiteur lance tous ses « familiers » (enquêteurs ayant tous les droits) sur la trace du mystérieux graveur. Parmi eux, se distingue un hidalgo Angel Maria de la Cruz y Alta Mesa sale et pauvre forcé de fréquenter la populace et toujours accompagné d’un chien purulent et hideux. Cet homme frustre est aussi un artiste. Deux riches familles juives converties sont avec l’hidalgo au cœur du roman . L’une a une fille, Léa de Montesa, éduquée, cultivée, raffinée, artiste elle est espèce négligeable, contrainte de taire ses capacités intellectuelles et ses dons naturels. Alors qui est l’assassin qui a déclenché de terribles persécutions ? A travers la rose, allégorie de la résistance à l’obscurantisme, ce roman est celui d’une rébellion et du fanatisme. La fragile Léa de Montesa par l’art, la gravure et la beauté défie l’inquisiteur. L’écriture est fine, belle et précise et la lecture addictive. En conclusion, voici un roman court, original qui captive du début à la fin. Hier comme aujourd’hui, peut-on dire non à la barbarie ?

     

    « Sa Seigneurie » Jaume Cabré

    L’avis de Marie-Lou :

    J’ai sûrement eu tort de lire ce livre après « Confiteor » et surtout « Les voix du Pamano ». Est-ce bien le même auteur? Ou bien a-t-il changé de nègre ? Je n’ai pas aimé ce livre et j’ai eu beaucoup de mal à m’intéresser aux petits soucis de Sa Seigneurie et de sa « bande » d’inutiles. J’ai arrêté avant la fin renonçant du coup à connaître le sort du jeune Andreu emprisonné à tort et au mystère Ciset-Reyme…


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  • Atelier lecture du 28 juin 2018

     

    « Falco » Arturo Pérez Reverte

    L’avis de Marie-Lou :

    Comme à chaque fois avec un roman de Pérez Reverte, on est spectateur et non lecteur tellement il sait nous rendre vivants ses personnages et réels ses paysages, ses scènes, l’atmosphère… On est dedans ! Ici on suit Lorenzo Falco dans une aventure en Espagne pendant la guerre civile. C’est un espion qui, pour sauver sa peau (juste par opportunisme), s’est retrouvé du côté franquiste au moment du soulèvement militaire de 1936. C’était un aventurier (trafiquant d’armes entre autres) sans foi ni loi, beau garçon toujours à la recherche d’une conquête féminine. Il nous apparaît, malgré tout, sympathique car il est intelligent, insolent avec la hiérarchie et devenu philosophe par ses expériences de la vie. Il fait toujours face mais sans réel engagement : « En qui devrais-je croire ? En des généraux appelés par Dieu pour sauver l’Espagne de la horde marxiste ou en une République prolétarienne qui défend sa liberté ? ». Il est donc enrôlé au sein du SNIO « grupo lucero » dépendant du quartier général militaire spécialiste en « infiltrations, sabotages et assassinats d’éléments ennemis tant en zone républicaine qu’à l’étranger ». Son chef «  el Almirante » est un opportuniste comme lui. «  Je ne dispose que d’une vie. Un bref moment entre deux nuits. Et le monde est une aventure si formidable que je ne suis pas disposé à perdre. » Sa mission : avec l’aide de la marine allemande il doit, avec un groupe d’une vingtaine de phalangistes, faire évader José Antonio Primo de Rivera de la prison d’Alicante. Pour ce faire, il doit traverser les lignes ennemies, se rendre à Cartagène (depuis Salamanca) où il rencontrera les militants qui vont l’aider. C’est toute une galerie de portraits que l’auteur nous présente au fil du périple de Falco ; il y a de tout : des phalangistes fanatiques jusqu’au simple étudiant idéaliste, des filles, des gars… et toujours dans sa bouche ses remarques qui nous le rendent finalement intéressant : « Ma guerre était tout autre, les deux parties adverses étaient bien claires : moi d’un côté, de l’autre : tous les autres. » On suit avec un réel plaisir tous les préparatifs, les rencontres, les trahisons, les contre-temps, les règlements de compte… Enfin arrive le jour J de l’attaque de la prison…On y assiste vraiment ! Après un coup de théâtre final (il fallait s’y attendre…), Falco terminera son aventure sinon en héros, mais au moins en paix avec lui-même.

    « Monastère » Eduardo Halfon

    L’avis de Janine :

    Eduardo Halfon est né au Guatemala en 1971 et a passé une partie de sa jeunesse aux Etats-Unis. « La pirouette » a obtenu en Espagne le prestigieux prix José Maria de Peredor. En 2007, l’auteur est nommé parmi les quarante meilleurs jeunes écrivains latino-américains au Hay festival de Bogota. En 2012, il bénéficie de la bourse Guggenheim. Il vit aujourd’hui dans le Nebraska. Il est lauréat du prix Roger Caillois en 2015.

    « Monastère » :

    Eduardo, jeune ingénieur de Guatemala, part en voyage avec son jeune frère à Jérusalem pour assister au mariage de leur sœur avec un juif orthodoxe, ce qui ne les enthousiasme pas. Eduardo ne voit pas Israël comme la Terre Promise, pour lui ce n’est qu’un devoir familial d’autant que le fiancé sa sœur, qui est de Brooklyn, divorcé, passé par les alcooliques anonymes, coupé de sa famille fait partie d’un courant ultra-orthodoxe. Au cours de la visite de Jérusalem au centre hassidique qui reçoit ce courant Eduardo se sent de plus en plus mal à l’aise et compare ces juifs orthodoxes à des vautours. Si bien qu’il décide de ne pas aller au mariage, rebuté par une telle puissance, une telle comédie. Néanmoins il repense à ses grands-parents d’origine arabe juive :

     

    Le grand-père paternel arabe juif de Beyrouth

     

    La grand-mère arabe juive d’Alexandrie

     

    La grand-mère arabe juive d’Alep.

    Mais il se souvient aussi, lorsqu’enfant il dormait dans la même chambre que son frère, que leur mère leur demandait tous les soirs de faire leur prière qui consistait à dire six mots hébreux : cherna, israël, adonaï, elohenou, chad qu’ils récitaient mécaniquement et n’évoquaient que la présence de leur mère et ses baisers. Un jous de Shabat, petit, il avait jeté son châle dans la synagogue et donc avait déjà un certain refus de sa judéité. Il se souvient tout particulièrement de son grand-père polonais, arrêté dans son pays. Eduardo a réalisé un voyage en Pologne pour voir où son grand-père avait été arrêté en novembre 1939, il avait seize ans, a été prisonnier pendant six ans dans plusieurs camps de concentration. A sa libération, il a quitté la Pologne offensé par ses compatriotes et s’est installé au Guatemala. Avant de mourir, il a donné à Eduardo un petit papier jaune sur lequel était inscrite son adresse complète en Pologne. (Là, par contre, apparaît un intérêt sur le sort des juifs à travers le personnage de son grand-père.) Dans la dernière partie du livre Eduardo rencontre Tamara, hôtesse de la Lufthansa, qu’il avait déjà connue au Guatemala. Tamara, israélienne sensuelle et impulsive, emmène Eduardo passer une journée au bord de la mer Morte, au cours de laquelle elle le confronte à ses contradictions, le pousse à affronter sa judéité, remonter le chemin de ses origines.

    L’hebdomadaire  « L’express » écrit à propos de l’auteur : « Eduardo Halfon devient le premier écrivain nord-américain de langue espagnole ». Il a une vraie maîtrise du romanesque, un côté brillant, une alternance entre profondeur et légèreté, délicatesse et humour.


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